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Message : Re: Limitations des polices vectorielles actuelles

(Olivier RANDIER) - Mardi 09 Décembre 1997
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Subject:    Re: Limitations des polices vectorielles actuelles
Date:    Tue, 9 Dec 1997 03:44:21 +0100
From:    Olivier RANDIER <orandier@xxxxxxxxxxx>

>Bonjour.
>
>Je rebondis sur ce qu'a dit Jacques André à propos des polices créées
>par contour. Je suis frappé, en consultant ma vieille collection
>d'"Illustration" du début du siècle, de la richesse de la présentation
>du texte, non seulement dans les polices employées pour le corps, mais
>aussi dans l'ornementation, les cadres, et les lettrines.
>
>En particulier je trouve décevant qu'on ne puisse, dans les formats de
>polices vectorielles usuels, utiliser pour le dessin des caractères des
>niveaux de gris, voire même des couleurs. Ce sont des possibilités du
>dessin vectoriel qui ne sont pas exploitées dans les polices, et c'est
>dommage : impossible de faire des polices inspirées d'enluminures, ou
>des polices de lettrines plus modernes, et très intéressantes, datant du
>début du siècle.

Là, je t'arrête. Il est tout-à-fait possible de faire des polices aux
éléments colorisables, moyennant quelques bidouilles en type 1 et une bonne
connaissance de postscript, pour les type 3. Pour le postscript, s'adresser
à Jacques Andre ;-)
En type 1, j'ai fait ça pour des fontes de logos. Le principe est très
simple : tu fais l'ensemble de ta lettrine nickel sur un signe. Tu fais
autant de copies de ta fonte que tu as de couleurs différentes et, dans
chaque copie, tu supprimes les éléments qui ne sont pas de la couleur
concernée. Ensuite, il suffit dans le logiciel ad hoc de taper le texte
désiré, de dupliquer le bloc sur lui-même autant de fois que l'on a de
couleurs, puis de choisir la police et la couleur souhaitée pour chaque
élément. Il existe au moins une fonte, chez Adobe, qui utilise ce principe
: le Copal (3 couches/couleurs), et je crois que Letraset en a fait
quelques-unes. L'intérêt de ce principe est d'ailleurs de profiter de la
gestion du trapping de XPress, plus pratique que celle d'Illustrator.
J'avais fait les logos de tous les clients de ma boîte selon ce principe,
mais je ne m'en suis jamais servi (pas osé).
Pour les logiciels ne sachant pas faire des superpositions, il est possible
de faire la même chose, mais en répartissant les couches sur plusieurs
caractères de la même fonte, et en jouant sur des chasses nulles.
Pour des dégradés, le passage par postscript et le type 3 est
incontournable, je crois.

>De même, mais peut-être est-ce un problème plus lié au fonctionnement
>des traitements de texte, il est impossible de définir plusieurs dessins
>pour un même caractère (ce qui me semble utile pour les manuaires et
>scriptes qui tentent d'imiter une écriture manuscrite) ni de spécifier
>un dessin dépendant de l'enchaînement des caractères (je pense aux Qu,
>st et ct du Garamond, qui sont si jolis dans les éditions de la
>Pléïade).

Là aussi, ça peut se faire. Deux problèmes distincts :
- les substitutions de glyphes contextuelles.
Par exemple, selon la position du signe dans le mot, comme ça se fait en
arabe (où c'est géré par WorldScript), ce qui pourrait très bien être
transposé aux scripts latins. Et quand il y avait des sociétés qui
proposaient de vectoriser votre écriture pour en faire une fonte, ils se
vantaient de savoir modifier la forme du signe selon sa position (mais ils
ne disaient pas comment ils faisaient). Enfin, le format GX, qui n'a hélas
jamais décollé, était censé savoir gérer ça. On peut penser qu'OpenType
intégrera ces fonctionnalités. Reste que cela impose de dépasser la limite
des 8 bits.
- les substitutions aléatoires de caractères
Il y a eu, là aussi, des tentatives, comme le Beowulf de Van Blokland et
Van Rossum. Chaque appel de caractère y provoque un tirage aléatoire parmi
des formes de caractères superposées.
Pour plus de précisions, la lecture de la thèse de Jacques Andre est très
éclairante.

>Evidemment, la mode n'est pas, en matière décorative, à la complication
>des formes. Mais les limitations actuelles des fichiers de polices
>aboutissent finalement à une simplification de la typographie et de la
>présentation des textes. La composition par ordinateur a ici détruit, en
>facilitant le travail systématique, la liberté de la main du
>dessinateur.

En fait, je dirais que le peu d'attention qui a été porté jusqu'ici à ces
technologies tient à deux choses :
- leur difficulté de mise en oeuvre, dans le contexte de l'époque,
- la présence d'un standard opérationnel (Adobe Type 1) et de l'utilitaire
permettant son affichage (qui ne gère que les type 1).
Il faut bien comprendre qu'au début, ce qui a prévalu, c'était
l'opérationnabilité, et la pratique quotidienne.
On peut espérer que l'arrivée conjointe d'Unicode, d'Opentype et de Display
PostScript vont autoriser quelques fantaisies supplémentaires, notamment en
libérant le créateur de la contraintes des 8 bits (même si on peut compter
sur Adobe et MicroSoft pour verrouiller leur truc au max :( ). D'autre
part, la montée en puissance des matériel devrait permettre des choses
autrefois inconcevables (je rêve toujours à la génération d'instances MM à
la volée !).

Donc, tout ça est possible. On attend les outils, et les créateurs.

Olivier RANDIER -- Experluette		mailto:orandier@xxxxxxxxxxx
		http://perso.wanadoo.fr/thierry.vidal/
Claviers et scripts WorldScript translittérés pour faciliter la composition
des langues est-européennes, du grec et du cyrillique.