Re: Capitales construites géométriquement

[Jacques Andre <Jacques.Andre@xxxxxxxx>]

Jean Fontaine wrote:
> 
> La page d'accueil de cette encyclopédie des maths montre les lettres de
> l'alphabet (capitales romaines) construites géométriquement, comme on aimait
> le faire à la Renaissance. Quelqu'un reconnaît-il l'origine de ces
> schémas-ci? Dürer? Le Champfleury?
> 
> http://www.math.pku.edu.cn/stu/wsxy/sxrjjc/wk/Encyclopedia/

Puisque tu as accès à ce site, ce qui n'est pas mon cas avec Netscape 4.et qq,
tu devrais leur envoyer un message disant qu'il est illisible pour beaucoup !
Thierry m'en a envoyé une copie de la couverture, ce qui me permet de répondre :

Il ne s'agit pas de Tory qui donne toujours une grille de ses caractères, mais
bien de Dürer (son P non fermé, les patins supérieurs du T, la queue du R sont
caractéristiques). COmparer avec les planches de son Underweysung der messung
(1525) traduit en français par Jeanne Peiffer (Géométrie, Le Seuil, 1995),
planches également reproduites ailleurs bien souvent (p.ex. dans la thèse de
Blanchard). Voir un article de Herman Zapf sur ces caractères de la Rennaissance
dans :
http://www.gutenberg.eu.org/pub/GUTenberg/publicationsPDF/37-zapf.pdf

MAIS... il y a un sacré mais ! 
Cette couverture donne trois caractères que Dürer n'a pas dessinés (pas plus que
ne l'ont fait ses copains italiens de la Rennaissance) : J et U (qui dans les
inscriptions lapidaires romaines sont remplacés par I et V) et W !
Par ailleurs, les cercles de construction sont (dans cette couverture) en entier
alors que Dürer n'en indiquait parfois qu'un arc (typiquement les cercles
définissant les patins des V, X et Y) voire que le centre (le O).
D'autres cercles ont été ajoutés : Dürer ne met pas (contrairement à Pacioli,
TOry, etc., d'où le doute de Fontaine) de cercle inscrit dans le carré ; ici
toutes en ont.
Par ailleurs l'axe qui est très nettement à 45 degrés chez Dürer (c'est la
diagonale du carré) est ici beaucoup plus petit (environ 20 : regardez les O et
Q). Enfin, certaines constructions sont fausses : le O par exemple est ici
construit avec au moins 1 +4 cercles alors que Dürer n'en cite que deux et dit «
trace à la main, là où les deux cercles se croisent,  les parties les plus fines
du trait de la lettre, dans leur juste forme ».

Alors ? Ce n'est pas du Dürer authentique, mais un plagiat. 
Ce n'est pas le premier : Alan Hoenig a aussi créé une fonte d'après Dürer, en
Metafont (voir TUGBoat 11 (1990), num.3). Il s'est basé sur les constructions de
Dürer et a inventé les lettres manquantes puis supprimé les traits et cercles de
construction. Par ailleurs, il donne des variantes comme Knuth ou Billwala en
jouant sur la présence ou non de patins, et ajoute gras, italique, typewriter,
etc. Il a même modifié cmr pour créer des bdc qui aillent avec son dürer !


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Jacques André
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