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Message : Re: [typo] Des points à la place des balles ?

(Jean-François Roberts) - Vendredi 06 Juin 2003
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Subject:    Re: [typo] Des points à la place des balles ?
Date:    Fri, 06 Jun 2003 17:14:31 +0200
From:    Jean-François Roberts <jean-francois.roberts@xxxxxxxxxx>


> De : Thierry Bouche <thierry.bouche@xxxxxxxxxxxxxxx>
> Société : Nonsense Inc.
> Répondre à : typographie@xxxxxxxx
> Date : Fri, 6 Jun 2003 13:35:12 +0200
> À : typographie@xxxxxxxx
> Objet : Re: [typo] Des points X la place des balles ?
> 
> Le vendredi 6 juin 2003 à 10:16:39, Serge B écrivit :
> 
> 
> SB> Pendant mes études de maths, j'ai vu partout des i.e., dont l'usage était
> SB> aussi courant que cqfd (ou c.q.f.d.) ;
> 
> oui, les matheux sont gavés d'anglo-saxismes (je vais pas chercher à
> distinguer la manche et l'atlantique... mais je suppute, vue
> l'ancienneté de l'emprunt, qu'il s'agit plutôt de la Manche) de ce
> genre. Exemple canonique : « trivial au sens mathématique », qui
> n'est pas autre chose que le sens anglais (banal).
> 
> i.e., viz. (plus rare), numéroter en chiffres romains bdc, tout cela
> c'est des emprunts à une tradition scholastique anglo-saxonne.
> 
> Ce qui m'amuse, c'est que, précisément, C.Q.F.D.  commence à perdre du
> terrain par rapport à Q.E.D., mais c'est beaucoup plus récent, et
> demandez-vous sous l'influence de quelle civilisation puissante &
> dominante quoique barbare ? (notez tout de même que ça aussi, c'est du
> latin !) dans le même genre, « preuve » vs. « démonstration », etc.
> 
> 
> SB> D'une manière générale, en maths, il me semble que le latin a toute sa
> SB> place. Si les théorèmes sont rédigés en langue vulgaire, les calculs
> SB> emploient bcp d'abréviations : l'usage du latin plutôt que d'abréviations
> SB> liées à une langue particulière facilite grandement la lecture d'un texte
> SB> étranger.
> 
> ce point de vue est ... généreux, mais il ne décrit absolument pas la
> réalité. Ce qui assure le succès de ces emprunts c'est uniquement un
> goût commun pour la pédanterie (les étudiants écrivent et prononcent
> « hi-euh ; cé-effe », ça n'est plus une abréviation (Mr se lit
> « monsieur » et pas « emme-erre ») puisque le sens initial s'est perdu.
> La plupart seraient incapables de citer la locution latine abrégée).
> Prononcer « triviaâl » sur un ton pointu semble ouvrir les clés de
> l'appartenance au _happy-few_.
> 
> (...)
> 
> Thierry Bouche   
> 

Si je ne m'abuse, "CQFD" se lit bien  "cékuhefdé" : je n'ai jamais entendu
un prof (ça se passait en France, années 50 et 60...) dire ça autrement. Et
les Anglais eux-mêmes prononcent "aïe-î" pour "i.e." Bref : sans même parler
des sigles, il n'y a pas de règle absolue et universelle pour la lecture des
abréviations (nombreuses et anciennes attestations de "céheff" également).

Quant à "trivial" en mathématique, c'est bien son sens d'origine (en
français également), issu de la tradition scolastique (sans "h" en français
!) des arts libéraux (eux-mêmes au nombre de sept) : le _trivium_
("carrefour") étant le groupe de trois disciplines enseignées en premier,
seuls les étudiants avancés progressant au _quadrivium_ (les 4 disciplines
"supérieures"). Est trivial ce qui est à la portée du premier venu, donc
(et, par extension, "vulgaire", au sens du _vulgum pecus_ ou de la
"vulgate", avec la même dérive de sens, en français, que ce terme).