Re: [typo] Police éditions Actes Sud

[Pierre Roesch <pierreroesch@xxxxxxxxxx>]

> Et qu'est-ce qu'un vrai et qu'un faux Garamond ? Si on y va de votre 
> exigence,
> les garamonds stempel, Adobe et autres n'en sont pas plus que les 
> jannon. Tout
> ça ne sera jamais qu'interprétation du boulot de Garamond, et encore. 
> De quoi
> sont partis Slimbach, Lange et les autres ? de fumés des poinçons 
> d'Anvers ?
> d'une épreuve ? bien imprimée ? quel corps a été pris en référence ? 
> Lange
> a-t-il repris les poinçons Stempel de 1924, qui sont déjà une 
> interprétation du
> Garamond au travers du spécimen Egelnoff-Berner, ou bien est-il 
> reparti du
> spécimen Egelnoff-Berner ? pourquoi a-t-il lissé les défauts de 
> gravure de 1550
> ET de 1924 ?

Pour commencer, ne mélangeons pas les réinterprétations modernes et les 
créations ancrées dans l'histoire.
Les efforts variables de fidélité à des originaux anciens posent divers 
problèmes, selon que l'on part de poinçons ou d'impressions.
Le numérique (par rapport au plomb) pose en plus un problème de 
netteté. C'est particulièrement apparent avec le Centaur (numérique) 
qui est un contre-sens, ne prenant pas en compte les effets 
d'impression plomb qui engraissent considérablement le dessin.
Ce débat pourrait prendre des pages.

Soit dit en passant, Slimbach est allé à Anvers, et je suppose qu'il 
n'est pas le seul.

Mais il y a l'évolution des sensibilités, des modes qui font plus ou 
moins vite passer d'une interprétation (« Garamond vu par Jannon ») à 
un style nouveau.
C'est ce que démontre selon moi très brillamment Bringhurst.
Il détaille la naissance d'un style baroque en typographie au début du 
XVIIe.

En suivant votre raisonnement, Garamond n'aurait fait qu'une variante 
des Aldines, etc.
Or il se passe 40 à 50 ans entre les caractères vénitiens et ceux de 
Garamond, puis 50 à 70 ans entre ce dernier et Jannon.
Cela impliquait de profonds changements dans les goûts et les 
sensibilités artistiques— les guerres de religion et le mouvement (dans 
tous les sens du terme) de la contre-réforme ayant balayé le sens de la 
mesure et de l'harmonie propres à la Renaissance.

> Je vois bien ce que vous voulez dire en fait, en opposant les garaldes 
> type
> garamond et garaldes type jannon, mais très humblement, je crois que 
> l'on PEUT
> dire qu'_un_ Jannon EST "une variation de garamond".
>
> C'est en tout cas comme ça que l'a gravé Jean Jannon (cf. archives IN, 
> de la
> vente des matrices "Garamont" de Jannon à l'imprimerie royale, entre 
> autre,
> ainsi que les travaux de HDL Vervliet).

Toute œuvre importante dépasse les intentions de son créateur.

En résumé, Jannon est baroque, Garamond humaniste.
Quant au Garamond ITC, c'est une aimable fantaisie.