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Message : Re: [typo] De l'écrit inclusif, par un renégat (Thomas Linard) - Vendredi 19 Mars 2021 |
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Subject: |
Re: [typo] De l'écrit inclusif, par un renégat |
Date: |
Fri, 19 Mar 2021 11:33:40 +0100 |
From: |
Thomas Linard <thlinard@xxxxxxxxx> |
Bonjour,
Effectivement, il ne date pas d’hier. Et il y aurait à dire et
redire sur ce texte. Pour ne prendre qu’un passage :
Certains substantifs se féminisent tout naturellement:
une pianiste, avocate, chanteuse, directrice, actrice, papesse,
doctoresse. Mais une dame ministresse, proviseuse, médecine,
gardienne des Sceaux, officière ou commandeuse de la Légion
d’Honneur contrevient soit à la clarté, soit à l’esthétique, sans
que remarquer cet inconvénient puisse être imputé à
l’antiféminisme. Un ambassadeur est un ambassadeur, même quand
c’est une femme.
Jean-François Revel nous dit donc qu’il y aurait des féminins
admissibles, et d’autres non. Parmi ceux qu’il ne faudrait pas
employer :
- Ministresse
: ça ne se dit plus guère, c’est vieilli. Le mot est bien
formé, mais son retour n’est guère plausible. Pourquoi en
parler, sinon pour construire un épouvantail ?
- Proviseuse
: mot parfaitement formé. Comme on dit réviseuse,
superviseuse. « Il y a eu de tout temps un proviseur ou une
proviseuse de la chapelle de la Vierge. » https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k55669514/f192.image.r=proviseuse
- Médecine
: très bien formé, son seul problème c’est l’homonymie.
Pourtant, pour ne prendre qu’un exemple, l’homonymie
ne gêne pas quand on parle d’avocat (quand une personne vous
dit qu’elle aime les avocats, le contexte vous permet —
généralement — de savoir si elle vous parle de ses gouts
culinaires ou de ses fantasmes érotiques).
- Gardienne
des Sceaux : je suppose que gardienne d’enfants ne pose pas
de problème. Ça doit être comme maitresse : maitresse
d’école, sans problème, mais maitresse de conférences,
surtout pas, et encore moins maitresse des requêtes au
Conseil d’État… Au fond, le problème, ce n’est pas la
féminisation, c’est le pouvoir des femmes.
- Officière
: « Après quoi les grands officiers et les grandes
officières de la couronne les menèrent à l’appartement de Sa
Majesté » (Voltaire, Candide, https://fr.wikisource.org/wiki/Candide,_ou_l%E2%80%99Optimisme/Garnier_1877/Chapitre_18)
- Commandeuse
: commander + -euse, rien que de très normal. Comme
quémandeuse.
- Ambassadeur
: je suppose que l’argument, c’est qu’ambassadrice, c’est
pour l’épouse de l’ambassadeur ? Quand Renée Crespin du Bec,
maréchale de Guébriant, fut envoyée par Mazarin accompagner
Louise-Marie de Gonzague-Nevers pour la mener à son royal
fiancé en Pologne, elle fut nommée « ambassadrice
extraordinaire de France ». Et pourtant, ambassadrice
signifiait déjà à l’époque le plus souvent « épouse de
l’ambassadeur ». C’est que le français n’a pas de suffixe
pour distinguer les deux catégories (en espéranto, on peut
distinguer par des suffixes entre l’ambassadeur en titre,
son époux, son épouse, l’ambassadrice en titre, son époux,
son épouse… mais pas en français) : le féminin conjugal et
le féminin professionnel, c’est le même ! C’est pourquoi il
y a existé des étudiantes bien avant que les femmes soient
admises à l’université : c’était les maitresses (pauvres)
des étudiants (fils de bourgeois) — Fantine, la mère de
Cosette dans Les Misérables, est une étudiante
abandonnée par son étudiant. Et lorsque les femmes purent
entrer à l’université, elles devinrent des étudiantes, et
tout le monde a vite oublié que cela désignait auparavant
des semi-prostituées. Et c’est aussi pour cela qu’il a
existé des électrices bien avant que les femmes aient le
droit de vote dans un quelconque pays : c’était les épouses
des électeurs (du Saint Empire). Et quand les femmes purent
voter, elles devinrent des électrices, pas des électeurs.
C’est qu’en français, on emploie tout simplement un mot
féminin pour parler des femmes, et un mot masculin pour
parler des hommes, et quelques rares exceptions (anciennes
métaphores le plus souvent) n’y changent pas grand-chose.
En fait,
la véritable règle qu’il devrait énoncer, c’est celle-ci :
plus un titre ou une profession est haute en prestige et en
pouvoir, moins il faut féminiser.
Et on
est libre de penser que c’est une règle stupide et sexiste, et
de ne pas la suivre.
Le 18/03/2021 à 20:42, Didier Verna a
écrit :
Je pense qu’il faut relire ce texte qui pourtant ne date pas d’hier...
https://chezrevel.net/le-sexe-des-mots/
- Re: [typo] De l'écrit inclusif, par un renégat, (continued)
- Re: [typo] De l'écrit inclusif, par un renégat,
salix9506 (18/03/2021)
- Re: [typo] De l'écrit inclusif, par un renégat,
Didier Verna (18/03/2021)
- Re: [typo] De l'écrit inclusif , par un renégat,
Jacques Melot (19/03/2021)
- Re: [typo] De l'écrit inclusif, par un renégat,
Thomas Linard <=
- Re: [typo] De l'écrit inclusif, par un renégat,
Didier Verna (19/03/2021)