Tschichold : "Livre et typographie"

[Paul Pichaureau <ppichaur@xxxxxxxxxxxxxxxxxxxx>]

J'ai acheté il ya quelques jours « Livre et typographie », de Jan
Tschichold. Ce livre m'a rapidement agacé !

  Pour ceux qui ne connaissent pas Tschichold, je rappellerai juste que
ce typographe a bouleversé la typographie traditionnelle dans le courant
des années 20, alors qu'il n'avait pas 30 ans, en publiant notamment   
« La nouvelle typographie », qui est un livre  « qui fait encore
autorité », comme on dit... Lors de l'arrivée d'Hitler au pouvoir, les
opinions de Tschichold ont été proscrites, et lui-même a du se réfugier
en Suisse. Par la suite, il est revenu à une vision plus classique de la
typographie, pour devenir un défenseur les plus acharné de la
typographie ancienne, condamnant sans appel les mouvements d'avant-garde
qu'il avait lui-même créé.

  Dans « Livre et typographie », Tschichold expose une vision du travail
de l'artisan du livre que je qualifierai tout simplement de
réactionnaire. Morceaux choisis :

  « Au bout d'un demi-siècle d'expérimentations effectuées avec une
    multitudes de caractères d'aspect nouveau et varié, on constate que
    les meilleurs sont ou bien les classiques eux-mêmes [...] ou leurs
    copies, ou de nouveaux qui ne se différencient pas beaucoup des
    anciens.»

  « En 1925 apparut la soi-disant Nouvelle Typographie. Elle exigea 
    une simplicité radicale, et l'abandon de la composition. Elle 
    commit en même temps deux erreurs de jugement. Elle attribua aux
    seules variétés des caractères la confusion de la typographie 
    moderne et crut avoir trouvé le remède, et même le style de notre
    temps, en employant les caractères bâtons et la "grotesque".»

et encore

  « [les lettres gothiques] mises à part, la minuscule romaine
    de la Renaissance est notre écriture depuis des siècles. Tout
    ce qui a suivi ne fut que variations de la mode, simples
    défigurations, pour la plupart, des nobles formes originelles,
    et n'améliorant rien.»

  Ces citations sont prises dans les premières pages exposant une
certaine vision de la typographie. Ascèse, effacement de l'artisan
devant le livre, retour aux règles anciennes sont les idées maitresses.  

  Les chapitres suivant exposent des règles typographiques concernant la
page de titre, le format du livre, l'emploi de capitales, des tirets,
etc. Là encore, Tschichold prend exemple sur les livres de la
Renaissance, à l'exception de tout autres.

  Pour tout dire, un tel livre est très intéressant, par la somme de
connaissance sur les règles typographiques de la Renaissance qu'il
expose, mais je le rangerai à l'extrême-droite de ma bibliothèque (ce
qui n'a aucun rapport avec les opinions politiques de l'auteur !!!) tant
il refuse toute tentative de modernisation, toute recherche nouvelle,
comme si l'effort des typographes de la Renaissance pour créer une
nouvelle conception de la chose écrite devait nous suffire, et que nous
devions nous en contenter.

  On voit nettement que ce livre a été écrit avan l'avénement de la PAO.
Je me demande quelles opinions Tschichold professerait de nos jours...

  De fait, la version française n'a certainement pas été faite dans
l'esprit de Tschichold : outre une traduction défectueuse (qui frise
parfois le contresens), on rencontre régulièrement des majuscules non
accentuées, alors qu'elles sont tout de même utilisée dans le titres des
chapitres !

  Bref, un livre intérressant, bien qu'agaçant parfois. Ce qui ne peut
qu'en accentuer l'intérêt...


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 Paul  Pichaureau                  e-mail: ppichaur@xxxxxxxxxxxxxxxxxxxx
 Et il arriva que                  Strasbourg, France  -  03 88 10 70 84 
 le Jeune Paul...                  IPCMS (http://www-ipcms.u-strasbg.fr)