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Message : Re: Gare a Sabon

(Olivier RANDIER) - Samedi 28 Novembre 1998
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Subject:    Re: Gare a Sabon
Date:    Sat, 28 Nov 1998 03:08:58 +0100
From:    Olivier RANDIER <orandier@xxxxxxxxxxx>

>  J'aimerais que les idolâtres du Sabon-Italic m'expliquent pourquoi le p
>est « semi-sérif » tandis que le q est « bi-sérif ».
>  Ensuite, ils pourront peut-être me justifier les jambages du f et ß
>(avec un petit mot pour le j).  S'ils sont toujours en forme, ils
>pourraient se pencher sur le cas du h, du m, du n et du o qui ont
>l'air d'avoir absorbé trop de levure.

Je n'en suis pas un (d'idolâtre), mais je peux répondre : il suffit de
connaître un peu le ductus de l'italique humanistique. Quand on trace le p,
la main remonte ensuite pour aller tracer la boucle, le sérif créé par ce
mouvement suffisant, le calligraphe peut négliger de l'achever en repartant
vers la gauche. Pour un q, la boucle est tracée d'abord, la hampe après. Le
calligraphe n'a aucune raison de ne pas finir son sérif.  Cette distinction
est fréquente. Pour le f et le ß, l'absence de sérif est traditionnelle et
remonte à la caroline (en caroline historique, la hampe de ces lettres
était tracée en deux fois, une en descendant -- l'attaque, l'autre en
montant, ce qui explique l'arrêt brusque, au moment du changement de
direction). Si on avait un s long, il aurait la même terminaison. Ce n'est
pas le cas, par contre, du j, dont l'amorce de sérif à gauche représente
simplement la fin naturelle du tracé descendant de la hampe (et annonce la
boucle complète de l'anglaise).

C'est bien d'un mathématicien, ça, de vouloir que les sérifs d'une italique
soient tous identiques. C'est oublier que l'italique est _fondamentalement_
une fonte manuscrite, et conserve volontiers la trace de ses origines.

Bon, chaque fonte comporte des choix de cet ordre, qu'on peut apprécier ou
non, c'est forcément subjectif. Tant que ces choix demeurent justifiables
dans le contexte, il n'y a aucune raison de jeter le bébé avec l'eau du
bain. Pour le Sabon, on aime ou on aime pas, mais je n'y voie pas de faute
de conception manifeste, même si c'est vrai que le o paraît, à première
vue, un peu large. Mais il faut aussi regarder le résultat global : un
signe très réussi sur le papier peut finalement ne pas s'accorder avec le
reste de la fonte et un signe apparemment médiocre peut s'avérer couler de
source.
J'ai quelquefois composé en Sabon, et je trouve qu'il vit assez bien.

Olivier RANDIER -- Experluette		mailto:orandier@xxxxxxxxxxx
	http://village.cyberbrain.com/technopole/Experluette/index.html
Experluette : typographie et technologie de composition. L'Hypercasse
(projet de base de données typographique), l'Outil (ouvroir de typographie
illustrative).