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Message : Re: All-Fr.

(Jef Tombeur) - Mercredi 17 Février 1999
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Subject:    Re: All-Fr.
Date:    Wed, 17 Feb 1999 15:34:53 +0100
From:    "Jef Tombeur" <jtombeur@xxxxxxxxxxxxx>

----- Message d'origine -----
De : Olivier RANDIER <orandier@xxxxxxxxxxx>

>Enfin, je soutiens que cet abus, dans la majorité des cas,
sert à marquer
>une gradation dans l'exclamation, pour masquer l'incapacité
de l'auteur à
>la faire ressortir par le contenu.

Tiens, tu peux aller plus loin : l'emploi de l'italique en
tant que marque d'emphase, de substitut à la périphrase,
"c'est moi qui souligne", etc.
Je suis incapable de me souvenir de l'auteur ou de la
citation, mais en fac, la prof qui nous donnait les
rudiments de la présentation des mémoires de DEA nous citait
un de ses anciens profs. Lequel considérait que cet emploi
de l'italique correspondait à une incapacité de l'auteur à
organiser son discours (construction expressive de la
phrase, organisation des paragraphes, etc.). Je précise
qu'il s'agissait d'anglicistes (du genre
Sorbonnards-Oxbridgiens), ce qui explique peut-être cela.
J'utilise principalement l'italique pour les citations
(classique), les mots étrangers supposés - par moi -
nouvellement survenus dans la gamme des mots commençant à
être usités en France (genre "trendy" il y a deux ans, ou
"portail" il y a quelques mois, mots que je n'italise plus à
présent), mes propres néologismes ou ceux des autres
(dernièrement, franglise, dans la phrase : dans la pub, ça
franglise copieux - ce qui a valeur "d'auto-sic", pour ainsi
dire). J'estime que mes pratiques sont criticables, mais
"fonctionnent" plutôt bien pour le type de publication
auquel je collabore. J'ajouterai que je viole au besoin mes
propres rêgles en fonction de la justif impartie (genre :
pas de possibilité de caser plus de quatre mots courts sur
une même ligne, et dans ce cas, au-revoir guilles et
italique).
Bon, AMHA, c'est sur l'idée de rupture qu'il faut parfois
battre le fer de l'expressivité typographique.
Et où commence la négritude littéraire et dans quel espace
se circonscrit l'apport du correcteur ?
'Splication.
Comparer :
- blablabla, évidemment, blablabla (texte original)
- blablabla - évidemment (avec ou sans sclam) - blablabla
- blblablalabllabla. Evidemment. (et au besoin, passer la
phrase suivante en nouveau paragraphe).
- blablablabla. Eureka ! (en lieu et place de "évidemment").
C'est l'évidence même, non ? Selon votre confession, vous
estimerez ou non que l'intervenant a franchi la borne de ses
fonctions. Bien sûr, la nature et la destination du texte
peuvent ou non autoriser la dernière intervention (dans un
fanzine méridional, pourquoi pas "Hé, con !" à la place
d'Eureka). Mais c'est aussi le statut même de celui qui
corrige (correcteur, réviseur-correcteur, sec. de rédac. ou
nègre), sa subjectivité, etc., qui entrent en ligne de
compte.
En France, les traducteurs littéraires sont qualifiés de
co-auteurs (je ne porterai pas d'appréciation, ça serait
trop long ; mais pour avoir été le nègre d'une traductrice,
je m'autorise à penser que ce n'est pas toujours exagéré).
Pour un correcteur, la maîtrise de la rupture peut, à mon
sens, aller jusqu'à proposer à l'auteur d'extraire une
phrase du continuum du discours pour la placer en notes (si
le texte et la publication s'y prêtent).
L'auteur et le correcteur, c'est comme l'architecte et
l'entrepreneur : il y a un moment, quelqu'un verse de l'eau
pour faire le béton.
Pour en revenir au propos initial ("l'incapacité de l'auteur
à la (l'expressivité) faire ressortir par le contenu"),
l'intervention du correcteur tient à ce qu'il est ou non
capable (question de pouvoir, de statut, comme de capacité)
d'agir en tant que co-auteur. J'estime que, par exemple,
Olivier en a certainement les capacités, je ne sais pas s'il
en a toujours le pouvoir, et je suis persuadé que dans la
plupart des situations de production actuelles, avoir
assimilé le(s) code(s) typo et les rêgles de la composition
est une condition nécessaire mais non suffisante. On en
tirera toutes les conclusions qu'on voudra par rapport à la
segmentation et aux contenus des formations dispensées à
ceux amenés à traiter de la copie, et à leur mode d'emploi
ultérieur.