Archive Liste Typographie
Message : Re: Livre électronique : suite et fin (?)

(Fabrice BACCHELLA) - Lundi 29 Novembre 1999
Navigation par date [ Précédent    Index    Suivant ]
Navigation par sujet [ Précédent    Index    Suivant ]

Subject:    Re: Livre électronique : suite et fin (?)
Date:    Mon, 29 Nov 1999 00:48:42 +0100
From:    Fabrice BACCHELLA <fabrice.bacchella@xxxxxxxxxxxxxx>

Je trouve votre façon de placer le débat assez néfaste & simplificatrice. D'un
coté nous avons les brillants hérauts de la modernité, ouvert & capable
d'évolutions, futur maître du monde. De l'autre de pauvres encroutés
réactionnaires et nationaux, destinés à disparaitre tel le tyranosaurus ex-rex.
Le débat est plus complexe que cela. Notament en matière d'éditeur. Je ne suis
pas convaincu que les gros éditeurs, ceux disposant de la plus riche
bibliothèque, soit moteurs. Au contraire, se sont eux qui ont le plus à perdre.
L'expérience récente du DVD, supposé anti-copie et dont la protection n'a pas
tenue deux ans, risque de leur faire peur. Si le piratage du DVD à grande échelle
n'est pas pour tout de suite (les ressources nécessaires sont trop importantes),
celui du texte, une fois la protection tombée, sera proprement prodigieux. Si
l'on considère que toutes les oeuvres sur les cinquantes dernières années sont
protégés (estimation que je fais prudente, en l'absence de toutes connaissances
dans le domaine), on a là quelque chose d'une richesse incroyable, des milliards
qui peuvent disparaitre en quelques jours une fois la protection déjouée.
Imaginez Sarte, Hemigway, Duras, Eco mais aussi Sulitzer, King ou Crichton en
libre diffusion. Au contraire, ce sont les petits éditeurs, incapable de
supporter les frais de stockages & d'impression, qui voudront se mettre au livre
électronique. D'où un choix assez faible & donc un frein important au
développement. Qui de plus ne s'accroîtera pas, selon le principe vieux comme le
monde qui veut qu'on ne prête qu'aux riches : les nouveaux auteurs continueront a
être édités par les grands noms, synonyme de prestige & de prix littéraire. Donc
seront édités sur papier. De petites maison d'éditions, purement nationales,
seront elles tentées de jouer le jeux, car elles n'ont rien à perdre. De toutes
façons, leurs poulains n'hésiterons pas à partir pour espérer obtenir un
Gongcourt. Leur but ne sera alors pas de viser le long terme, de trouver un
auteur en pariant sur la longévité, mais au contraire de viser le coût, de façon
à engrenger le maximum de chiffre avant la copie de toutes façon inéluctable de
leurs livres.

Par contre un tel livre aurais peut-être sauvé les PUF.

Je voudrais aussi rappeler que s'il a été question récemment d'abonnement et de
prix très réduit pour la disposition d'un tel produit, il est a moins avis
nécessaire de lire les petites lignes d'un contrat. Notament en matière de
remplacement & réparation d'un lecteur électronique. Si la situation est la même
(ce que je pense) que pour les téléphone portable, l'utilisateur final ne paie
absolument pas l'appareil à sa vrai valeur. Toute perte ou casse devient alors
très douloureuse pour le porte monnai. Si les accros au cellulaire (dont je suis)
protestent & en rachètent un nouveau, le propriétaire d'un e-livre risque plutôt
de faire une croix sur son abonnement & revenir au papier quand on lui présentera
la facture.

Mais à l'opposer, je crains que si suffisament de monde y trouve son compte, en
aucun cas, des notions de bibliophilie ne puissent arrèter les lecteurs moyens.
Entre un objet pratique & peu chère mais froid & impersonel ou un livre papier,
même correct, le lecteur moyen n'hésitera pas. Il prendra le plus pratique & le
moins chère. Il est clair donc que c'est un domaine à surveiller, afin de limiter
les dégats & éviter de se retrouver obligé à lire l'Iliade en HTML avec des
guillements dactylographique & au fer à gauche si la direction du tout
électronique devait être prise.

En résumé, la situation actuelle est incertaine. Il est largement trop tôt pour
crier victoire ou pleurer la défaite, quelque soit son camp. Essayer de prédire
la part de marché de votre produit nécessite des arguments plus fins & étudiés
que les arguments digne d'une campage de pub de Seguéla que vous évoquez.