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Message : TV (lourde, lente)

(Eric Angelini) - Lundi 21 Février 2000
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Subject:    TV (lourde, lente)
Date:    Mon, 21 Feb 2000 16:23:16 +0000
From:    "Eric Angelini" <keynews.tv@xxxxxxxxx>


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> De : Jacques Andre

> Ma question est donc, « n'y a-t-il pas de correcteurs
> télé ? ».

... ma réponse est : il n'y a pas.

Je connais relativement bien le pb puisque je travaille
ds une boîte qui livre pour la télévision des program-
mes « clef en main ».
                       À la télévision on rencontre la
même ignorance que dans la presse papier pour tout ce
qui est accentuation des capitales, cédillage du C ca-
pital, ligaturage des {oe} et {ae} etc. Le sous-titrage
est un immense chantier (sous-titrer c'est adapter)
qui demande d'incroyables compétences quand on veut fai-
re les choses « bien ».
                        Les génériques sont un autre
chantier gigantesque (titres, fonctions, lisibilité,
durée à l'antenne, mouvements, fontes etc.), d'autant
plus frustrant qu'ils sont systématiquement accélérés à
la diff ou coupés, ou recadrés. Ne parlons pas des
textes qui s'impriment à l'écran (comme quand une voix
off lit un article de loi ou un jugement, ou une let-
tre d'un téléspectateur) : l'orthographe vous met des
« pose » en place de « pause », des Pérec pour l'écri-
vain, usw.
           Qui est chargé des écritures en télévision ?
Le préposé au « générateur de caractères », ou la (le)
script(e), ou un « producteur » quelconque et, in fine,
le réalisateur. Mais tous ces gens n'ont pas assez de
temps (antienne connue).
                         Ce qui est sous-traité convena-
blement, en général (et encore), c'est l'« habillage »,
soit les titres des émissions, le générique de début, les
bandes annonces, les « virgules », etc., toutes choses
confiées à des sociétés dont c'est le métier (comme Gédéon
à Paris), et qui ont de vrais pros de la typo, de la pub
et de l'illu. Ces sociétés donnent une « marche » très
précise à leur client (gamme pantone, fontes à utiliser,
arrivée et départ des titres, raccords, incrustations...).
Mais une fois la facture payée, le diffuseur est livré
plus ou moins à lui-même... et à une cohorte de petits
métiers qui font parfois n'importe quoi.
                                         Pour les émis-
sions « de flux » (ce qui est éphémère, produit pour un
seul passage vite fait), les choses sont moins contrôlées
encore que pour les émissions dites « de stock ». Bref,
c'est dur. Dans ma société je n'arrive pas à obtenir,
depuis 18 mois, que le mot « coeur » soit ligaturé : il
passe tous les dimanches à 18 h 30 dans l'intertitre
« coup de coeur » et enfonce à chaque fois plus profond
les clous de mon cercueil...
                             Ceci dit, là comme ailleurs,
je crois que le niveau monte - chez les nouveaux : les
vieux pontes, comme presque partout, sont des vieux cons -,
ne fût-ce que parce que Word et Excel sont sur leur bu-
reaux. Les machines (les fameux « générateurs de caractè-
res ») progressent aussi et commencent à tenir compte des
spécificités des marchés linguistiques (elles sont livrées
avec des clefs payantes virtuelles qui « libèrent » cer-
taines touches et fonctions). Donc la situation, je pense,
ira en s'améliorant (arrivée des jeunes, progrès de la
quincaille). Il faut que les éducateurs et que les écoles
fassent aussi leur métier : pour bien titrer, sous-titrer,
corriger, composer, il faut de la culture générale (cultu-
re typo comprise).
                    Mais il ne se passe pas de jour sans
lequel je hurle à la mort, comme Jacques et ses milliards :
il y a en permanence dans mon bureau 4 moniteurs de télévi-
sion allumés (Euronews, CNN, BBC World + 1 écran destiné
au zapping) - le son est coupé, qd m^m ! Oserais-je le dire
ici ? Ce sont les Anglo-saxons qui typographient le mieux
à 25 images/seconde ! Chûûûût !
à+
EA