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Message : Re: Ponctuation et espaces (Hermes)

(Alain Hurtig) - Lundi 16 Octobre 2000
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Subject:    Re: Ponctuation et espaces (Hermes)
Date:    Mon, 16 Oct 2000 05:35:52 +0200
From:    Alain Hurtig <alain@xxxxxxxxxxxxxxxxxx>

At 21:24 +0200 15/10/00, Olivier RANDIER wrote:
Même si t'en parles pas, moi, j'ai envie d'en parler de tes lettrines.

Elles sont là pour qu'on en discute.

Mais mon premier propos vis-à-vis de la liste Typo était les lézardes, les blancs, la justif', le gris. Ça s'adressait aussi à Olivier, qui m'avait affirmé dans un mail privé que mon projet serait très difficile à monter, avec une justification si étroite et un corps nécessairement très petit.

ne sais pas où t'as été pêché cette idée de lettrines encastrées dans la
fin du chapitre (?) précédent, mais j'adore ça,

Content que ça te plaise.

Il s'agit des sauts de paragraphes, mais je ne suis pas certain que ça fonctionne vraiment pour tout un bouquin. Au bout d'une vingtaine de pages, c'est fatiguant, répétitif, systématique.

Comme Thierry l'a signalé, il s'agit du « principe de Bordas », qu'il est allé pêché dans ce bouquin de typo espagnole. Principe inventé par l'auteur, dont il donne un exemple peu satisfaisant pour l'oeil, et dont il prétend bien à tort qu'il facilite la vie du typographe. Fichier d'exemple à http://hurtig-toda.nom.fr/tmp/bordas.pdf.

Ça m'a amusé de voir comment ça se passait dans la vraie vie, et puis ça posait un problème technique redoutable pour l'opérateur PAO (à savoir moi), ce qui est toujours rigolo à résoudre. J'avais cet opuscule sous la main, que j'avais envie de composer, alors je m'y suis lancé.

Le « principe » canonique s'est avéré injouable dans cette justification étroite, et cette hauteur de colonne assez faible (et encore mon auteur ne fait presque jamais de paragraphes ; qu'est-ce que ça aurait été s'il écrivait par fragments...) Je ne suis pas certain qu'il soit jouable avec une justification plus large.

D'où l'idée de subvertir le principe, de rompre les alignements, de créer le morceau de ligne blanche au dessus, etc.


même si ça doit être
abominable à composer, surtout sur une justif' aussi étroite.

C'est surtout très gonflant, parce qu'il faut faire tout le temps des choix, qu'ils ne sont jamais bons, qu'il faut revenir en arrière, etc. J'en suis au moment où ça devient franchement répétitif et mécanique, alors j'ai du mal à finir le travail...

Là où je ne
suis pas d'accord, par contre, c'est sur ce qui suit la lettrine.

C'est marrant que ça arrache l'oeil à ce point-là ! Dans les éditions anciennes, personne ne le voit, personne ne s'en plaint.

Je le répète, ça a été une pratique _constante_ jusqu'au XVIIIe siècle, puis ça a été progressivement abandonné. Et je ne trouve pas que ce soit une absurdité : la grande capitale fait le lien entre la lettrine et les petites capitales. C'est juste une question d'habitude.

Enfin, je trouve les
lettrines souvent trop espacées par rapport au texte.

C'est la grande faiblesse du « principe de Bordas ». Pour _chaque_ lettrine, j'ai bataillé dur afin de les rapprocher du texte, pour créer une gouttière qui ne soit qu'une rigole. Ça n'a jamais été possible. En ce qui concerne la deuxième ligne, souvent très écartée de la lettrine (et qui semble donc être au fer à droite et non pas justifiée comme elle devrait l'être), tu as raison dans l'absolu et j'en ai chaque fois été désolé...

Mais note la quantité de contraintes auxquelles je suis soumis - je ne gère pas seulement le paragraphe en amont, la lettrine, le texte en petites capitales et la ligne normale qui vien en dessous, mais aussi tout le paragraphe en aval, qui doit « tomber » juste afin d'avoir la place de mettre la lettrine suivante (ou ne pas créer de veuves/orphelines).

Pour que le pavé de texte en petites capitales ait un sens (graphique tout autant que de lecture), on ne peut pas mettre de césure à la fin de cette seconde ligne. Et puis il faut qu'elle soit plus courte que la première ligne. Même en admettant que je tolère les césures à l'intérieur du pavé « bordas », mettre cette seconde ligne au fer a parfois été la seule solution.

C'est une concession du bon goût et de la logique. Note que j'en ai fait une autre, en admettant que les fins de paragraphes ne soient pas justifiées (la dernière ligne est presque partout au fer à gauche). Ça m'a absolument désolé de faire ça, mais je me retrouve parfois dans des justifications si étroites que l'interlettrage ou les espaces inter-mots devenaient démesurés et hideux.

Cadratin standard réglé à 40 %.

Ce serait pas plutôt le blanc variable (la fine, quoi) ?! ;)

Oui, je m'a trompé... Et même je me serais gourru.

L'intérêt de
l'espacement avant point et virgule est de répartir les variations
d'espacement des mots sur un plus grand nombre d'unités espaçantes.

Là encore, l'intérêt premier était à la fois de répondre à deux questions posées sur la liste, l'une portant sur les soit disant lézardes que ça engendrerait (ça n'en engendre pas) et sur le fait de la difficulté de lecture que ça apporterait (ça aide la lecture).

Il faut
donc que cet espace supplémentaire soit justifiante, donc subordonnée au
réglage C & J d'intermots. En la construisant en dur, tu la subordonnes au
réglage d'interlettrage, réduisant quasi à néant sa variabilité.

Tu as raison, sauf que tu as tort. Tu as raison dans ton argumentation, mais tu oublies que les approches par triplet ne sont pas autorisées. Qu'est-ce que je fais lorsque la virgule doit être juste un peu décollées de la lettre, mais pas franchement séparées (cas de la séquence « v, », par exemple). Un triplet [lettre-espace-virgule] n'est pas gérable...

(ça doit être faisable
via les XTags),

Ou avec ProLexis ?

Ça me fait penser qu'il faudrait que je mette en ligne la _Tristesse du
Diable_, lézardée par mes soins, que certains ont vu lors d'un précédent
typothon.

Depuis le temps que tu dois le faire ;-).
--
Alain Hurtig mailto:alain@xxxxxxxxxxxxxxxxxx
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Or ça, salopins, serre-argent, palotins, hommes de finances, larbins
chimiques, approchez ici. Qu'avez-vous à m'apprendre ?
   Alfred Jarry, _Ubu cocu_