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Message : Re: Colophon (une enquete)

(Alain Hurtig) - Lundi 26 Janvier 1998
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Subject:    Re: Colophon (une enquete)
Date:    Mon, 26 Jan 1998 10:31:38 +0100
From:    Alain Hurtig <alain.hurtig@xxxxxx>

At 9:22 +0100 26/01/98, Michel Andreani wrote:
>	Alain pourrait-il nous instruire sur la définition (la vie,
>l'oeuvre) du colophon ? Mon petit Larousse est muet.
>
je peux, je peux...

La définition la plus complète que je connaisse est celle de F. Richaudeau
(_Manuel de typographie et de mise en page_, Retz éd., Paris, 1989) :
« Colophon: c'était clans l'Antiquité, puis au Moyen Age, puis sur les
premiers incunables, un texte placé en fin de l'ouvrage et caractérisant
celui-ci : nombre de feuilles, de colonnes, de mots... (pour les volumen ou
rouleaux) ; puis : titre, auteur, éditeur, date... (pour les livres). Ces
dernières mention figurant de nos jours pour l'essentiel en page de titre,
le colophon disparaît remplacé par l'achevé d'imprimer
« Sauf si l'éditeur manifeste un certain soin pour la rédaction et la
typographie de celui-ci. Par exemple dans le cas d'une édition numérotée,
ou s'il reproduit sa marque ; comme dans le présent volume avec le « carré
magique » RETZ. »

Peut-être l'origine en remonte-t-elle aux massorètes, ces premiers copistes
de la Bible (tout le premier millénaire de notre ère). Ainsi, dans la Bible
massorétique, le premier livre (_Genèse_) se termine par ces mots :
« Nombre total de versets : 1534. Le milieu du texte se trouve au verset :
« Sur ton épée tu vivras... » (ch. 27, v. 40). Ses sections sont au nombre
de 12. Ses divisions sont au nombre de 43. Ses chapitres sont au nombre de
50. Nombre d'alinéas : 43. Nombre d'espacements : 48. Au total : 91 alinéas
et espacements » (cité dans : _La Bible_, « Entête », trad. et prés. : A.
Chouraqui, Desclée de Brouwer, Paris, 1974.)

Il s'agissait bien entendu pour ces savants et pieux rabbins (graphomanes
de surcroît ;-))de préserver l'intégrité de la divine et révélée parole.

Au moyen âge, avec l'explosion de la copie de textes, le colophon s'est
développé. Il ne s'agissait plus seulement de préciser les caractéristiques
techniques du bouquin (afin d'éviter d'en perdre des feuilles, par
exemple), mais aussi d'en noter l'histoire : date de la commande, nom de
l'acheteur, atelier de compo... de copie, etc.

Parfois, pas toujours, le copiste faisait un peu d'humour dans son
colophon, se présentait lui-même, ou se livrait à un petit exercice de
virtuosité. C'est que copier des livres n'est pas toujours rigolo, ça peut
même être assez fastidieux. Dans les expos, on nous présente les _beaux_
livres du moyen âge, avec enluminures, dessins, notes marginales, mises en
pages spectaculaires, mais en fait le tout venant, c'était des pages et des
pages de texte morne, qu'il fallait recopier de façon morne.

Le contrat implicite était alors que le copiste avait le droit de
« s'éclater » dans le colophon, de faire une « belle page » (et certains
colophons sont effectivement extraordinaires). Sous réserve que ce colophon
contienne les éléments traditionnels, bein entendu. Pour le reste, la
présentation (forme et fond) appartenait au copiste.

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Et puis ça a disparu...

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Dans un courrier privé, Jacques André me signale que :
>Je mets souvent un « colophon » (commençant explicitement par
>ce mot) dans l'ours des Cahiers GUTenberg donnant le nom du logiciel
>utilisé (en génbéral LaTeX) et la fonte principale utilisée (p.ex.
>Palatino pour le cahier 27).

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Voilà...

Alain Hurtig                                         mailto:alain.hurtig@xxxxxx
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Si vous pensez avoir enfin trouvé la solution, eh bien ! une bonne nuit
de sommeil et il n'y paraîtra plus.
    Brigitte Fontaine