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Message : Re: retour du refoule

(Caroline Leduc) - Jeudi 06 Août 1998
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Subject:    Re: retour du refoule
Date:    Thu, 06 Aug 1998 03:50:30 +0200
From:    Caroline Leduc <carolineleduc@xxxxxx>

Je vous présente d'avance mes excuses si je me trompe de correspondant, mais c'est le foutoir dans mon courrier et je suis incapable de retrouver la lettre à laquelle je désirais répondre (ça m'apprendra à avoir un esprit d'escalier)
Je ne me souviens plus de l'auteur: en gros, il me titillait sur cette idée somme toute banale de la poésie comme "émanation de l'âme", et me suggérait de reprendre ma correspondance avec Bobillot (sans doute pour qu'il éclaire ma lanterne). Bon. Voilà une précision:
Je sens pointer votre ironie vis-à-vis de mon choix terminologique ; soit. Mais tenir un nom, n?est pas forcément s?assujettir à son histoire, ce serait choisir plutôt  la pérennité de son énonciation que celle de son énoncé : pour parler clairement, il me semble plus naïf de congédier un mot quand on veut en congédier l?usage (donner un autre nom à Dieu par ce que le sens de son gouvernement a changé, semble-t-il) que de s?astreindre à le définir, et le redéfinir encore, dans la nouvelle sphère de son usage. Remplacer « âme » par « idiosyncrasie » ou « ipséité », que sais-je,  ne changerait rien au problème, et y rajouterait même une vague notion ontologico-philosophique malvenue (l?homme, finalement- est encore plus mobile et insaisissable que l?âme?)
« A cette réponse nietzschéenne : qui parle ? Mallarmé répond, et ne cesse de reprendre sa réponse, en disant que ce qui parle, c?est en sa solitude, en sa vibration fragile, en son néant le mot lui-même ? non pas le sens du mot, mais son être énigmatique et précaire. » (M. Foucault)
Autotélisme du discours ? Sans doute. La place de l?âme est dans la respiration de ce qui EST l?homme au monde, ce qui lui rend le réel possible et intelligible, même si le prix à payer est de l?exprimer dans le désordre de l?angoisse (qui parle ?, c?est aussi qui ME parle ? C?est chercher, entre l?homme et le langage, la plus juste position du dominant, toujours partagée)  Le poème est une des issues de cette angoisse, questionnant âme et langage dans un jeu d?échange permanent du dominant, et c?est, au bout du compte, le poème qui pose les questions aux deux, tient les deux. Supprimer le pôle pneumatique, et vous touchez à la « société » du langage, la problématique ?par exemple- du roman. Evoquer l?âme, c?est évoquer l?irréductibilité du poème au contrat du sens partagé, c?est aussi appuyer l?idée que c?est bien la nature même du poème (et on pourrait étendre cette observation à l??uvre d?art en général) qui est le lieu de la rupture, et non ce que l?on appelle son discours.

Bon, il se fait tard, j'espère reprendre avec vous cette discussion dans cette liste passionnante. Et je vais de ce pas écrire un mot à Bobillot.