Archive Liste Typographie
Message : [typo] Re: et/ou

(Jacques Melot) - Jeudi 10 Juin 2010
Navigation par date [ Précédent    Index    Suivant ]
Navigation par sujet [ Précédent    Index    Suivant ]

Subject:    [typo] Re: et/ou
Date:    Thu, 10 Jun 2010 01:34:23 +0200
From:    Jacques Melot <jacques.melot@xxxxxxxxx>

Title: Re: [typo] et/ou
 Le 9/06/10, à 10:25 +0200, nous recevions de marie-alexandre :

Bonjour,

Petite vérification :
Comment composez-vous la locution et/ou ? Sans espaces ou avec fines ?


[J. M.]   L'introduction de la pseudoconjonction « et/ou », dont l'usage s'est répandu surtout après la Seconde Guerre mondiale, n'a aucune justification d'aucune sorte : c'est un artéfact langagier qui, à chaque fois qu'on le rencontre, a fortiori dans un texte par ailleurs soigneusement rédigé, doit être remplacé par la conjonction qui s'impose, soit ou le plus souvent, et dans les autres cas.

   La conjonction de coordination ou, laquelle existe dans toutes les langues humaines avec la même valeur fonctionnelle, indique ou propose un choix possible entre deux entités : elle n'est a priori ni inclusive ni exclusive, caractère qui, lorsque cela est nécessaire, lui est communiqué par le contexte ou, dans les cas où il s'agit d'exprimer une exclusion, par une formulation spéciale, lexicalisée (français : soit [...] soit ; ou sinon, etc. ; angl. : either [...] or ; all :. entweder [...] oder ; suéd. : antingen [...] eller, etc.).

   L'artéfact en question, « et/ou », qui doit son existence à un malentendu, doit donc être systématiquement corrigé comme une sorte de faute de langage, ce qui fait que la question typographique ne se pose pas.

   En pratique, « et/ou » obscurcit l'_expression_, ralentit la lecture (et l'écriture), entraîne des erreurs, malgré les apparences donne aussi souvent lieu à un allongement superflu du texte, et n'est pas applicable avec esprit de suite. Cette remarque, comme les précédentes, valent pour toutes les langues.

   Il fut un temps où l'on voyait beaucoup de « et/ou », notamment dans les manuels d'utilisation de logiciels. On a tendance désormais à éviter de l'utiliser dans des ouvrages où le but réel et ultime est de faire comprendre en s'exprimant le plus clairement possible. C'est notamment le cas des manuels de la société d'informatique Apple.

   Voyez aussi l'extrait d'un message que j'ai expédié au présent forum en 2005, cité aujourd'hui par Armelle Domenach. Je le redonne en Annexe, un peu plus bas.

   Jacques Melot

P.-S.   Le « ou » du restaurateur, évoqué par quelqu'un ici au cours de la discussion, n'est pas inclusif. Sa valeur particulière lui est communiquée par le contexte des us et coutumes de la restauration en France ; elle s'est installée et peut donc être considérée comme conventionnelle. Il  n'y a donc là rien qui infirme ni affaiblit ce qui a été dit plus haut.

   A y regarder de plus près, il s'agit en effet d'un usage spécial de la conjonction de coordination ou : il consiste à donner au client trois possibilités, à savoir de prendre le fromage, mais pas le dessert, le dessert, mais pas le fromage, enfin, ce que l'on oublie trop souvent en se précipitant sur ce qu'on croit être un contre-exemple irréfutable, il permet aussi de prendre ni l'un ni l'autre. Ce « ou » n'est donc pas même exclusif, du moins au sens strict du terme.


ANNEXE (J. M. 16 février 2005, 12:45).

   La conjonction de coordination « ou » a pour fonction d'indiquer l'alternative, fondamentalement sans idée d'exclusion ni... d'inclusion particulière. Utilisée dans certains contextes, elle prend une valeur exclusive : cela est tout à fait exact. Si elle doit avoir une valeur exclusive et que le contexte ne lui donne pas clairement cette valeur, alors on recours à une _expression_ appropriée, telle que « soit [...] soit », « [...] ou bien [...] », etc. La règle, en somme, est simple. Il faut préciser la conjonction « ou » par quelques mots d'appui ou une formulation adéquate à chaque fois que le contexte ne permet pas de savoir quelle valeur on lui attribue et qu'il importe qu'on le sache.

   Les considérations logico-mathématiques ne sont d'aucun secours dans le traitement de cette question.

   Jacques Melot
 


Merci.

Marie-Alexandre