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Message : RE: [typo] Goethe

(Jean Michel Pochet) - Samedi 03 Septembre 2016
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Subject:    RE: [typo] Goethe
Date:    Sat, 3 Sep 2016 13:02:22 +0200
From:    "Jean Michel Pochet" <jean.michel.pochet@xxxxxxxxx>

"En conséquence ... que le ne suis " (lire "suit")
Salutations
-----Message d'origine-----
De : typographie-request@xxxxxxxxxxxxxxx [mailto:typographie-request@xxxxxxxxxxxxxxx] De la part de Yoann LE BARS
Envoyé : vendredi 2 septembre 2016 13:54
À : typographie@xxxxxxxxxxxxxxx
Objet : Re: [typo] Goethe


	Salut à tous !

Le 02/09/2016 à 12:43, Jacques Melot a écrit :
> [J. M.]   C'est une raison très artificielle. Les correcteurs doivent
> s'adapter aux caractéristiques de leur langue, donc à ses variantes.
> Être correcteur est une profession.

	Je ne suis moi-même pas correcteur, donc je suis tout à fait
susceptible de dire des bêtises sur le sujet.

> [J. M.]   Encore faut-il s'entendre sur ce qu'est l'évolution d'une
> langue. Le plus souvent, il n'y a là qu'un simple prétexte à entériner
> toute sorte d'aberrations, les anglicismes, etc. En fait, l'évolution de
> la langue ne peut être décrite que longtemps après qu'elle ait eu lieu.
> L'unité de temps dans ce domaine n'est pas la petite semaine, pas plus
> que celle de la géologie n'est le mois ou l'année.

	Ne vous embarrassez pas trop, vous pouvez dire directement que vous
considérez que je fais de la linguistique à la petite semaine. Je ne
vous en tiendrais pas rigueur – vraiment pas, je vous assure.

	Cela dit, oui, l’évolution d’une langue se fait sur plusieurs années.
Cependant, on peut tout de même faire des constats.

	Par exemple, on peut constater que, dans la négation de la forme « ne
pas », le « ne » n’apparaît plus désormais que dans 1,5 % des phrases
négatives au Québec, 2,5 % en Suisse romande, à Tours dans 37 % des
phrases en 1976 et 18 % en 1995, à Paris sur la même période on passe de
16 % à 8 %. Dans les médias, l’usage de la particule « ne » était
maintenu dans 93 % des cas en 1960, mais dans 73 % des cas en 1997.

	Soit dit en passant, j’ai repris les chiffres d’un cas de Linguisticae
que j’ai déjà cité (https://www.youtube.com/watch?v=C3rDVBm0OXE), qui
lui-même donne ses sources, ça me faisait gagner du temps.

	En conséquence, on peut tout de même constater que le « ne » suis un
processus de disparition. On peut s’en indigner, considérer que c’est
une aberration, un signe d’ignorance généralisée ou s’interroger sur le
mécanisme qui fait disparaître le « ne » alors qu’historiquement c’était
plutôt lui qui portait la négation. Toujours est-il que l’on peut
constater ce qui est bel et bien une évolution qui à lieu en ce moment.

>    Pour en revenir à la norme, elle a une qualité qu'il ne faut pas
> oublier de citer, et ce, au premier rang : elle garantit pour une bonne
> part la fluidité de la lecture : ce qui est hors norme joue comme une
> sorte de rugosité qui l'entrave, peu ou prou.

	Quelque part, c’est ce qui s’est passé pour moi avec l’usage de
« postposer » pour « différer » en Wallonie. Cependant, à l’inverse, si
j’avais utilisé « postposer » dans le sens préconisé par la norme en
m’adressant à des locuteurs de Wallonie, cela aurait rendu leur
compréhension moins fluide. Du coup, est-ce que cette norme garantit
vraiment une compréhension fluide ? Dans le cadre où je m’adresse à des
Wallons, est-il plus légitime que je cherche à imposer à l’ensemble des
wallons ce que je considère comme le bon usage, ou bien que je m’adapte
à l’ensemble des individus auxquels je m’adresse ?

	Soit dit en passant, pour ma part j’ai réglé le problème en n’utilisant
jamais « postposer », tout simplement.

	Par ailleurs, par exemple, lorsqu’on lit dans /Aimer/ de Paul GÉRALDY
(1921) :

	« Alors, autant pour moi !… Je me suis trompé !… Je vous demande pardon. »

	Ce n’est pas en accord avec la norme telle que l’établi l’Académie
française. Cependant, la compréhension est-elle vraiment heurtée ?

	Ceci étant dit, pour ma part j’essaye de me conformer aux
préconisations de l’Académie française et de l’Imprimerie nationale.
Ceci parce que ça me donne une référence bien utile et un langage est
bel est bien un ensemble de conventions sur lesquelles on s’entend.
Simplement, ce n’est pas parce que cette norme existe qu’elle rend
d’autres usages illégitimes. Surtout, ce n’est pas parce que cette norme
existe qu’elle fait disparaître ces autres usages. Par ailleurs, quand
les usages font majoritairement différemment que ce que préconise la
norme, il n’est pas certain qu’elle garantisse la fluidité de lecture.

	À bientôt.

--
Yoann LE BARS
http://le-bars.net/yoann/
Diaspora* : ylebars@xxxxxxxxxxxxxxx


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