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Message : Re: Regrets (eternels ?) (fr.comp.pao)

(Michel Bujardet) - Lundi 24 Mars 1997
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Subject:    Re: Regrets (eternels ?) (fr.comp.pao)
Date:    Mon, 24 Mar 1997 00:16:23 -0800
From:    Michel Bujardet <mickietype@xxxxxxxxxxxxxxxx>

Alain Hurtig <alain.hurtig@xxxxxx> écrit ;

>[1] Lançons donc une petite guerre de religion, ça fait longtemps qu'on en
>a pas vu ici...
>« à priori » est devenue une expression française, donc avec accent sur le
>« à » ; c'est mon point de vue. Mais d'autres, arguant que c'est bel et
>bien une locution latine, ne veulent pas d'accent, et mettent « _a
>priori_ » en italiques. Le problème se pose aussi pour d'autres expressions
>d'origine étrangère. Qu'en pensez-vous ?

Il me semble que nous sommes là non pas dans la guerre de religion, mais
dans l'évolution des usages. Lorsque le français incorpore un mot étranger,
il faut habituellement un certain temps avant que les phénomènes de
maturation le rendent « autochtone ». Qui se souvient que « véranda » nous
vient du sanskrit, ou que « cravate » fût un terme venu de l'est (Hongrie ?
N'ayant pas de dictionnaire éthymologique ici, je ne peux vérifier).

Combien d'années faudra-t-il pour que le mot « clef » disparaisse au profit
exclusif de « clé ». Je parierai volontier que la première forme, encore
parfois utilisée, sera abandonnée un jour. En ce qui concerne les termes
venus du latin, et au regard de l'abandon graduel des études de cette
langue, combien de temps faudra-t-il pour que ceux qui se souviennent
encore des règles de grammaire ou de déclinaison disparaissent ?

On verra alors apparaître dans les manuels la mention "peu usité" pour les
formes en question. La forme ancienne restera encore pour un temps reconnue
par les érudits, puis vraisemblablement tombera dans l'oubli.

Certes, j'ai quelques boutons parfois lorqu'on me parle de scénarios, ou
d'un média. Personne n'aime le changement. Jusqu'à mon adolescence, les
camions utilisaient du gas-oil, et nous mangions parfois du beef-steak.
Quelques années plus tard, j'éprouvais les mêmes gratouillis face au gazole
et au bistek.

N'empêche, il me semble que la langue n'appartient à personne. Nos doctes
académiciens ne peuvent qu'observer la manière dont l'usage évolue. Et
donner des conseils, certes, mais rarement écoutés. Ce qui après tout est
plutôt rassurant. Pour Victor Hugo, formidable était encore synonyme
d'énorme et dangereux. Depuis déjà quelques décades, le sens a bien changé.
C'est formidable !

MB