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Message : Re: Typo scientifique

(Thierry Bouche) - Mercredi 12 Mai 1999
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Subject:    Re: Typo scientifique
Date:    Tue, 11 May 1999 15:03:52 +0200 (MET DST)
From:    Thierry Bouche <Thierry.Bouche@xxxxxxxxxxxxxxx>

Concernant « Typo scientifique », Eddie Saudrais écrit : «
» Bonjour,
» 
» étant prof de physique, je m'intéresse à deux aspects de la typo en sciences
» : la notation des unités, et la notation des symboles mathématiques.

Il faut aussi s'intéresser aux insécables avant la ponctuation double !

On cherche visiblement un expert en typo scientifique sur cette
liste. En l'attendant, je tiens parfois le crachoir, mais ne me prenez
pas trop au sérieux...

» UNITES :
» 
» 1. Pour le symbole du litre, c'est << l >> en France, et << L >> aux
» EU

Je n'en crois pas mes e-yeux : le système SI n'est pas SI
international que ça ?!

le symbole pour le litre, c'est « l », romain, sans point, quant à la
confusion avec un un, j'ai bu 300 1 d'eau vous semble vouloir dire
quelque chose ?

» 2. Dans le cas d'une vitesse en mètres par seconde, on note m s^{-1} (s
» exposant -1). Comment séparer le m et le s ? 

» Que préférez-vous ? 

indiscutablement point centré, sans espaces autour, sauf si les
approches sont vraiment insuffisantes. Est-ce que ml est mililitre ou
mètre-litre ? pour les polices à chasse fixe, mais aussi d'autres, les
approches du l sont telles qu'on aurait du mal à savoir si le blanc
consécutif  est à interpréter comme un « InvisibleMultiply » ou à ne
pas interpréter.

» 3. Puissances de 10. D'après la lecture des textes du NIST, il semble que la
» notation en usage pour, mettons 40 000, soit 40 x 10^3. On doit bien mettre
» le symbole x ? Pas 40.10^3 ni avec un point centré ? Il y a une espace de
» part et d'autre du symbole x ou non ?

il s'agit plutôt du symbole ×. J'ai l'impression qu'en effet ça se
composerait : 
40<espace fine>×<espace fine>10<exposant 3><espace moyenne><unité>. 

Pour l'espace moyenne, j'utilise environ 60 % de l'espace mot,
insécable, mais élastique. En latex : 40\,000\;m ou 40\;km ou
40\,\textimes\,10\textsuperscript{3}\;m. 

» MATHEMATIQUES :
» 
» 1 - Mathématiques et ponctuation. J'estime que les équations font partie
» intégrante du discours mathématique, et doivent y être incorporées
» naturellement : on doit les faire précéder et suivre de la ponctuation qui
» convient dans le contexte du discours. Vous êtes d'accord ? 

Oui et non, c'est une question difficile à trancher. Dans plein de
situations, des formules mathématque ressortissent plus à
l'illustration, au diagramme-support-de-pensée, qu'à un élément du
discours qui s'insère dans le flot du texte. Dans beaucoup de
situations aucune poncutation n'est nécessaire, simplement parce qu'on
centre des formules qui ne tiennent pas dans le pavé de texte, mais
qui n'en interrompent pas le flot. Il y a aussi toutes ces situations
où on ne saurait pas où mettre le point final d'une phrase : une page
de formules alignées, centrées, entre accolades, etc. J'ai pour ma
part _deux_ politiques. Le texte doit être ponctué, les formules le
seront tant qu'elle participent au texte, sinon non. J'admets donc le
double-point comme ponctuation finale d'une phrase. Du genre « par
suite de mon brillant exposé, il vient : <grosse formule> » et pas de
point après la formule. En revanche, j'utiliserais « C'est ainsi que
l'intégrale <formule centrée> converge vers... » mais « C'est ainsi
que l'intégrale <formule centrée>, qui converge vers... » ou encore
« Ceci assure la convergence de l'intégrale <formule centrée>. » Bref
c'est assez casse-pied parce que soit on modifie le texte pour qu'une
seule des deux situations se produise, ce qui permet d'être cohérent,
soit on a un système un peu bancal (pour le dernier exemple, on
pourrait par exemple remplacer par : « Ceci assure la convergence de
l'intégrale  suivante : <formule centrée> ».

» Doit-on
» respecter à la lettre les espaces avant la ponctuation (virgule accolée par
» exemple) ? J'ai vu (Dunod) insérer systématiquement une espace avant le
» signe de ponctuation quel qu'il soit. Pas terrible, non ?

non et non. On ne _doit_ rien faire. Une vieille habitude est de
forcer des espaces pour supprimer des ambiguïtés ou affirmer le statut
différent du texte et des maths. C'est souvent inutile, souvent
évitable : autant l'éviter chaque fois qu'on peut. D'un autre côté
c'est parfois nécessaire (imaginer une truc du genre : « une valeur
approchée de pi est donc <racine carrée de deux>. » Difficile de
savoir si le point est sous la racine ou pas...

» Et quand la formule est encadrée, on met la ponctuation à
» l'extérieur ? 

Non !

» En respectant les règles d'espacement ?

En respectant le lecteur, la cohérence, la lisibilité, et l'humeur du
jour.

» Qu'en est-il de la notation des vecteurs. Officiellement, il faut le
» noter en gras. Le coup de la flèche, c'est un dérive de prof au tableau, ou
» c'est plutôt le gras qui s'est imposé en typo devant la difficulté à faire
» des flèches de longueurs variables ?

Pour toutes ces questions, la réponse est assez simple.

1. Il y a une norme ISO/AFNOR : essayer de s'y soumettre.
2. Il y a des usages, les normes ci-dessus ne font guère que les
entériner, elles sont d'ailleurs assez conciliantes avec les variantes
(vecteurs avec flèches au secondaire, en italiques chez les
mathématiciens, en gras chez les physiciens). Préférer l'usage
dominant du lectorat concerné, à moins qu'on le juge aberrant et que
la norme soit meilleure (plus cohérente par exemple).
3. Tout auteur scientifique peut de bon droit introduire les
définitions et les notations qu'il désire, du moment que tout est
explicité. C'est la plupart du temps une coquetterie irresponsable
puisque ça rendra plus difficile l'accès au sens ou au savoir qu'il
est supposé vouloir divulguer. C'est parfois nécessaire pour marquer
un changement de point de vue qui pourrait passer inaperçu sinon. Ça
peut aussi avoir temporairement des vertus pédagogiques. 

J'espère ne pas être le seul à vous répondre, car ce que je viens
d'affirmer sur un ton péremptoire est assez discutable !


Thierry Bouche, Grenoble.