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Message : Re: ON A TEMPETE (accents sur les caps)

(Olivier RANDIER) - Vendredi 29 Septembre 2000
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Subject:    Re: ON A TEMPETE (accents sur les caps)
Date:    Fri, 29 Sep 2000 19:57:24 +0200
From:    Olivier RANDIER <orandier@xxxxxxxxxxx>

>>Le dogmatisme n'est pas du côté que tu prétends. Tous ici, nous
>>avons appris à l'école qu'on ne DOIT PAS accentuer les capitales.
>
>
>    Je ne me souviens pas d'avoir appris cela, d'autant plus qu'à
>l'école nous n'avions jamais à capitaliser quoi que ce soit. Nous
>n'étions d'ailleurs censé n'écrire qu'à la main (on ne nous apprenait
>évidemment pas les règles appliquées dans la composition des textes
>imprimés !).
>    Dans les petites classes, nous avons appris à écrire les
>majuscules sans signes diacritiques sans qu'il n'y ait eu répression
>particulière d'une éventuelle accentuation qui, vu les circonstances,
>n'avait, de toute façon, que peu de chances de nous venir à l'esprit.
>    Nous avons appris - essentiellement par IMITATION - à écrire sans
>accentuer les majuscules, et NON appris que l'on NE DOIT PAS
>accentuer les majuscules : la nuance est de taille ! Il n'y a jamais
>eu à ce propos la pression, cette fois bien réelle, que nous avons
>subie lors de notre apprentissage des règles de grammaire, par
>exemple.

Je regrette, mais, en ce qui me concerne, c'est faux. J'ai au moins un
souvenir précis de cette pression. Une prof de dessin nous a explicitement
interdit de mettre les accents sur les majuscules : il était implicite, de
la façon dont s'était dit, que le contrevenant aurait été mal noté.
L'exercice consistait à faire une pancarte avec son nom et prénom, et, à la
question posée (probablement pas par moi, puisque je n'ai pas d'accent dans
mon nom), la réponse a été péremptoire : "on n'accentue pas les
majuscules". J'avoue ne me souvenir ni de la classe, ni de mon âge. Je me
rappelle juste que c'était une vieille fille complètement conne qui
imposait ses goûts à ses élèves (elle a osé caviarder un de mes dessins, je
l'aurais tuée).
Déjà, à l'époque, cette assertion ne m'avait pas paru naturelle. Il me
semble même avoir demandé pourquoi on n'accentuait pas et la réponse avait
été du style ; "pasqueu". ;-(

>>J'arrêterai de dire qu'il faut accentuer les capitales lorsque les
>>instituteurs et les professeurs arrêteront de dire qu'il ne faut pas
>>le faire, OK ?
>
>    ... comme il ne l'ont jamais SPÉCIALEMENT dit, à part ceux qui
>précisément ont cette marotte. Et une marotte ce peut être n'importe
>quoi.

Je n'ai pas eu précisément l'impression que c'était une marotte.
Simplement, c'était comme ça, et elle n'avait jamais remis la chose en
question.
Peut-être que toi, tu n'as eu que de bons profs, mais je pense que pas mal
d'entre nous, moins chanceux, ont été confronté explicitement à ce mythe,
ne t'en déplaise.

>>À cause de ce mythe, des habitudes ont été prises qui nous posent
>>des problèmes quotidiens. Quand j'ai besoin de composer, pour des
>>raisons d'encombrement, une longue liste de noms propres ou
>>d'adresses en bas de casse et que je la reçois saisie tout en
>>capitales sans accent, accorde-moi que j'ai des raisons de m'énerver.
>
>    Oui, je connais ça (que de « rrrontudju @#!*$ » et « hver
>röndóttr » !), mais cet argument n'est pas à la mesure de la
>question. Il s'agit essentiellement d'une limitation technique du
>moment, concernant une toute petite étape, un souffle dans une longue
>évolution qui se poursuit. Que vaudra-t-il dans dix ans, compte tenu
>de l'évolution des techniques ?
>
Là, je ne comprends pas. Lorsqu'un texte comportant des noms propres en
capitales n'est pas accentué, l'orthographe des noms est impossible à
restituer, la technique et son évolution n'a rien à voir là-dedans (et
qu'on ne me parle pas de logiciels restituant l'accentuation, ça ne peut
pas marcher avec les noms propres).

>>-- Il est vrai que l'absence d'accentuation pose peu de problèmes,
>>les rares ambiguïtés vraies pouvant être levées par le contexte.
>>Mais le premier rôle du typographe est de ne pas compliquer le
>>travail du lecteur. Si l'on prend l'exemple de
>>CHARLES PASQUA DEGOUTE PAR LES REVELATIONS POSTHUMES DE MONSIEUR
>>MERY, le lecteur pourra assez facilement déterminer l'orthographe
>>réelle de DEGOUTE, mais ça lui réclamera un effort. Trop souvent
>>répété, cet effort engendrera un inconfort de lecture. Lisez _À la
>>recherche du temps perdu_ en capitales (ce qui n'est pas conseillé,
>>j'en conviens) accentuées et non accentuées et comparez le nombre de
>>cachets d'aspirine nécessaires.
>
>    Cas d'école : cite moi donc une raison pratique, réelle, même
>mauvaise (enfin pas trop...), pour le faire (non ! pas compter le
>nombre de cachets, mais capitaliser intégralement Proust). Avec de
>tels exemples tu risques sérieusement d'être gratifié de qualités
>légendaires...
>
Tu le fais exprès ? Mon exemple avait seulement pour but d'illustrer
l'effort que représente la lecture d'un texte en capitales non accentuées.
Volontairement stupide, il visait à amplifier la perception de cet effort
par la quantité de texte en jeu, pour que le lecteur puisse se le
représenter, c'est tout. La lisibilité d'un texte tient à des facteurs qui
peuvent paraître infinitésimaux, mais, qui, répétés tout au long d'un texte
peuvent modifier profondément le confort de lecture.
L'accentuation d'un texte est un de ces facteurs, c'est tout. Et puis, il y
a de plus en plus de graphistes qui semblent ignorer que la composition en
capitales est à utiliser avec parcimonie et bonessian, ce qui fait que mon
exemple n'est peut-être pas si extravagant que cela... On voit déjà des
chapôs complets d'articles en tout caps. Tiens, tu veux un exemple réaliste
: tu prends un compte rendu d'un grand colloque, à la fin, tu peux trouver,
disons 4 pages d'annuaire des intervenants avec leur ville d'origine,
composé en tout caps. Une version avec accents, une sans. Compare
simplement le temps de lecture par deux groupes témoins (je te laisse le
choix du protocole expérimental, pourvu qu'il soit équitable).

Olivier RANDIER -- Experluette		mailto:orandier@xxxxxxxxxxx
	http://technopole.le-village.com/Experluette/index.html
Experluette : typographie et technologie de composition. L'Hypercasse
(projet de base de données typographique), l'Outil (ouvroir de typographie
illustrative).