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Message : Re: plates-formes

(Jean-Philippe Moreux- Vuibert Informatique) - Vendredi 09 Novembre 2001
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Subject:    Re: plates-formes
Date:    Fri, 09 Nov 2001 10:06:39 +0100
From:    Jean-Philippe Moreux- Vuibert Informatique <jp.moreux@xxxxxxxxxx>

"La société X est fier de présenter son micronoyau multiplateforme
multi-utilisateur à l'usage des micro-ordinateurs de marque Y et des
mini-ordinateurs de marque Z."

Ces néologismes faisant le quotidien des éditeurs techniques (et
particulièrement en informatique), j'ai le plaisir de vous informer qu'ils
ne posent plus problème dès lors que l'on décide de séparer le préfixe avec
un trait d'union dans le seul cas de hiatus.

Alors, les perspectives d'enrichissement du vocabulaire sont infinies et
l'éditeur peut dormir l'âme sereine.

JPM
Editions Vuibert

PS : et que dire de ce "système d'exploitation multiutilisateurS" que l'on
trouve 9 fois sur 10 dans la presse et l'édition spécialisée ? pourquoi ce
_s_, hein, dites ?



Luc Bentz a écrit :

> ----- Message d'origine -----
> De : "Jacques Melot" <jacques.melot@xxxxxxxxx>
> À : <typographie@xxxxxxxx>
> Cc : "Jacques Andre" <Jacques.Andre@xxxxxxxx>
> Envoyé : jeudi 8 novembre 2001 17:43
> Objet : Re: plates-formes
>
> >     Mais encore une fois, il n'existe aucun exemple d'emploi du
> > préfixe « multi » suivi immédiatement d'un trait d'union en français
> > (dans le Petit Robert, du moins).
>
> Mais on doit pouvoir trouver dans la documentation technique (voire
> spécifiquement informatique) des exemples de « multi-utilisateurs ». On
> trouve ce type de construction, comme l'indiquait Jean-Pierre Lacroux,
> avec une utilisation « adjectivale ». J'espère que les considérations
> qui suivent ne vous ennuieront pas : il y a fort à parier que la
> question du « multi(-)plate(s)(-)-forme(s) se pose et se posera pour
> d'autres termes.
>
> Ce phénomère est sans doute (restons prudent) relativement récent.
> L'influence anglo-saxonne n'est pas seule en cause : l'éditeur de
> logiciels est heureux qui peut proposer le même produit pour macistes,
> fenestriens ou linuxeurs. Ajoutons qu'iI y a une certaine porosité entre
> la classe des noms et celle des subjonctifs (pensez aux usages de
>  bleu(s), rouge(s), grand, petit ». J'ai récemment lu que l'abbé Lhomond
> (qui nous fit souffrir avec le « De viris ») fut également l'auteur
> d'une grammaire qui, comme d'autres à l'époque, utilisait les
> appellations de noms substantifs (nos noms) et les noms adjectifs
> (rebaptisés ultérieurement « adjectifs qualificatifs » par opposition
> aux adjectifs « déterminatifs »). Mais les divers quantifiants
> (articles, adjectifs numéraux, possessifs, démonstratifs, etc.) ont peu
> à voir avec les qualifiants... et l'on observera que l'on peut
> substituer aux adjectifs des propositions relatives, des compléments du
> nom ou... des appositions.
>
> La difficulté dans laquelle se trouve le scripteur avec multiplateforme
> résulte sans doute de la fusion d'éléments dont un était lui-même
> composé (au moins à l'origine). Sans doute y a-t-il soudure dans
>  plateforme » (le P.R. donne les deux graphies, avec ou sans trait
> d'union comme possibles), puisqu'il y a belle lurette que la
> plate(-)forme n'a plus pour caractéristique essentielle d'être une forme
> plate (à lire certaines plates-formes, elles seraient dans certains cas
> assez creuses). Mais le français a plutôt horreur des mots rallongés,
> contrairement à l'allemand... et si vous me répondez par
>  inconstitutionnellement », c'est justement qu'il s'agit là d'une
> exception notable... et explicable (nous sommes là dans le domaine de
> l'adverbe et non celui du nom ou de l'adjectif).
>
> Une recherche rapide (que je viens de lancer) avec Google sur l'usage
> (qui peut être fautif !) donne :
>
> * 1 540 occurrences pour « multiplateforme » au singulier (y compris
> avec « Outils multiplateforme pour le travail collaboratif »... emploi
>  appositif invariable » qui m'étonne et qu'on doit peut-être à un effet
> du « multi », mais aussi « Langage multiplateforme vs. langage
> spécifique ») ;
>
> * 791 (environ, disent-ils) « multiplateformes » ;
> * 2060 « multi-plateforme » (dont « Histoire des logiciels
> multi-plateforme ») ;
> * 2300 « multi-plateformes » ;
> * 1160 « multi-plate-forme » (dont des « multi plate-forme » avec un
> blanc) ;
> * 483 « multi-plate-formes » (assurément fautifs !) ;
> * 2030 « multi-plates-formes ».
>
> La composition « multi-plateforme » témoigne du rôle spécifique du trait
> d'union (même si l'on peut y voir, ici, une anomalie, etc.).
>  Multiplateforme » me semble pourtant plus logique (il n'y a pas de
>  choc de voyelles »). Le double trait d'union me paraît plutôt rare...
>
> Sur cet usage fluctuant, Littré estimait « à propos que la critique
> essaye un triage, distinguant ce qui est bon, et prévoyant ce qui doit
> surnager et durer. »
>
> Il me semble, quant à moi, que « multiplateforme » (accordé si
> nécessaire) est la solution... la plus ergonomique... comme, dans un
> autre domaine, « polypensionné ».
>
> --
> Luc Bentz
> http://www.chez.com/languefrancaise/
> http://www.langue.fr.st/
>
> « Le blanc qui sépare les mots aide à la  compréhension du texte écrit ;
> et toute la ponctuation est à son image. » (Jacques Drillon)