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Message : Le cheval de Troie de la sexualisation du langage [fut : Re: Et pis... scènes]

(Jacques Melot) - Dimanche 06 Janvier 2002
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Subject:    Le cheval de Troie de la sexualisation du langage [fut : Re: Et pis... scènes]
Date:    Sun, 6 Jan 2002 16:12:53 +0000
From:    Jacques Melot <jacques.melot@xxxxxxxxx>

Title: Le cheval de Troie de la sexualisation du langage [fut
   J'avais préparé ce qui suit pour un groupe restreint (dont un groupe d'Islandais francophones), mais puisque je vois qu'on est lancé sur l'affaire dans le forum Typographie, allons-y !

   Pour répondre à un trouble-fête malchanceux, je précise qu'il s'agit d'un thème qui a un rapport certain avec la typographie, puisque des horreurs sur le modèle de « un ou plusieurs enseignant(s) et/ou enseignante(s) » sont envisagées et, en fait, prônées.

   Je trouve même franchement étonnant que dans un forum consacré à la typographie on puisse lire des propos plus ou moins conciliants à propos de telles formules insoutenables ! Même des formulations comportant une mise au pluriel alternative sous la forme d'un s entre parenthèses (par exemple « Le(s) enfant(s) aussi. ») sont incorrectes et doivent être considérés comme des raccourcis (« style télégraphique ») à remplacer nécessairement par une phrase correctement formulée. Seul cela est français.
   La brièveté apparente de telles aberrations, qui toujours est obtenue aux dépens de la lisibilité, est d'ailleurs un leurre et l'on s'aperçoit que ce sont encore les formulations correctes qui, non seulement, sont les plus brèves, mais encore les plus rapidement et les mieux comprises.

   Cette manière de confondre la langue avec un exercice de logique mathématique, est le harcèlement symptomatique d'une pensée inquisitoriale qui s'immisce dans notre intimité pour venir y contrôler notre pensée. Cette production perverse du monde universitaire anglo-saxon,qui trouve vraisemblablement son origine dans l'illusion de toute puissance à la fois de la science et de leur forme de société, est en train de miner la pensée romane de l'intérieur. Vigilance !

   Jacques Melot



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   Je prends ici la liberté de vous retransmettre un texte dont vous avez sans doute, pour une partie d'entre vous, pris connaissance du contenu.

   Les choses s'accélèrent et l'on sait qu'une fois mises en place on a les pires difficultés à faire machine arrière. Il est temps d'agir.

   Un des points faibles de ce qui a été entrepris en Suisse romande et que l'A.F.P. relate dans le texte reproduit plus bas est la propagande mensongère et la mauvaise foi dont s'assortit le projet.

   En attendant de faire de plus longs commentaires qui viendront éclaircir le titre donné, je joins (sous forme d'une illustration au format GIF) le résultat du début d'un sondage proposé sur la page d'accueil du journal La Tribune de Genève.

   L'échantillon est pour le moment réduit, mais d'ores et déjà très intéressant, tant la courbe de répartition qui s'en déduit est révélatrice : d'un côté environ 16 % personnes acquises à la sexualisation volontaire et ostentatoire du langage (réponse « totalement favorable »), de l'autre la portion de la population que cette entreprise indispose (de l'ordre de 60 %, réponse « totalement défavorable »).
   La proportion des personnes ayant une position modérée ou intermédiaire est étonnamment faible (réponses « plutôt favorable », 2,33 %, « couci-couça », 14 %, « plutôt défavorable », 7 %). La concentration vers les extrêmes est très caractéristique : la sexualisation du langage suscite à l'évidence une vive réaction de réprobation d'une large majorité. La faiblesse du nombre de ceux qui sont « plutôt favorables » (2,33 %) relativement au nombre de ceux qui sont « plutôt défavorables » (7 %), montre aussi que l'adhésion à la sexualisation du langage ne relève guère de la prise de position nuancée ou critique, ce qui, bien sûr, ne fait que confirmer ce que nous en savons déjà.

   Je pense donc que le première conclusion d'ordre pragmatique que l'on peut en tirer est que l'effet le plus évident d'une telle entreprise est de semer la zizanie en opposant une partie de la population à une autre.

   Jacques Melot


Sondage la Tribune de Genève






La Suisse romande prône l'égalité des sexes dans la langue
GENEVE (AFP) - Les fonctionnaires des sept cantons romands de Suisse ont reçu un guide leur recommandant l'emploi d'une langue "épicène": c'est-à-dire recourant à des termes communs valables pour le féminin et le masculin et respectant scrupuleusement l'égalité des sexes.

Exemples de langue épicène: "droits de la personne humaine" ou "droits humains" pour "droits de l'homme". Ou encore, Genève, "carrefour des idées et des êtres" au lieu de "carrefour des idées et des hommes".

Dans le cas -fort courant- où une formule épicène n'existe pas, le guide préconise le recours au trait d'union ou l'utilisation d'une formule double masculin-féminin.

Lorsqu'un texte de l'administration se réfère aux enseignants ou aux diplômés, il est ainsi suggéré d'employer la formule "enseignant-e-s" ou "diplômé-e-s". Au lieu d'écrire "l'utilisateur est responsable", on répètera chaque fois la formule double: "chaque utilisateur ou utilisatrice est responsable..."

Le féminin pourra aussi l'emporter sur le masculin au pluriel: il sera possible de parler d'"écoliers et écolières âgées de plus de dix ans".

Selon le quotidien La Tribune de Genève, ce "guide romand d'aide à la rédaction administrative et législative épicène", publié à 5.000 exemplaires et intégralement financé par les cantons romands, a suscité des réactions parfois agacées, certains fonctionnaires contestant "un langage politiquement correct et grammaticalement douteux".

La directrice du "Service public pour la promotion de l'égalité entre hommes et femmes" (SPPEgalité), dépendant du département cantonal genevois des finances, assure n'avoir reçu aucune critique.

Au contraire, "nous n'avons reçu que des commandes supplémentaires" d'agents soucieux de "féminiser leur texte" et d'éviter des formulations machistes quand ils rédigent leurs arrêtés, lettres ou offres d'emploi.

"C'est vrai qu'on embête certains d'entre eux, qu'on leur demande un travail supplémentaire. Mais nous ne sommes ni normatives ni contraignantes", assure la responsable genevoise. Selon elle, 2.000 brochures ont déjà été diffusées à Genève, le reste est parti dans les autres cantons, et "les stocks sont bientôt épuisés".

"C'est bien beau de féminiser les titres et grades, il faut encore savoir rédiger de manière égalitaire", remarque Mme Frischknecht. "Et il faut le faire de façon à ce que la langue française y trouve son compte", "la féminiser sans l'abîmer".

La manuel se veut "créatif" en proposant diverses alternatives de formules correctes. "Plutôt que de dire petits enfants, on a parlé d'enfants en bas âge, et ça ne pose plus de problème", assure-t-elle.

La délégué genevoise note une certaine "résistance" du français. "Pour la Suisse alémanique, le parlement fédéral suisse a déjà admis une féminisation des termes dans la rédaction allemande des lois. L'Allemagne n'a pas son Académie française, et il y a plus de marge de manoeuvre en langue allemande".

Toutefois, la féminisation des titres, lancée il y a dix ans en Suisse romande et inspirée largement de mesures similaires recommandées en France, est bien entrée dans les moeurs. "Si quelqu'un osait dire madame le président" dans une instance genevoise, "il se ferait huer", observe-t-elle.