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Message : [typo] Re: et/ou

(Jean-Luc BLARY) - Lundi 14 Juin 2010
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Subject:    [typo] Re: et/ou
Date:    Mon, 14 Jun 2010 07:52:49 +0200
From:    Jean-Luc BLARY <jeanluc.blary@xxxxxxx>

Title: [typo] Re: et/ou
Je ferai court : pas d'accord du tout avec vous. Vous basez toute votre pseudo-démonstration, d'une longueur plus qu'inutile, sur le postulat qu'on peut toujours s'en passer. Mais il est toujours possible de démontrer qu'on peut se passer de n'importe quoi. Si on écoutait les gens comme vous, on dormirait encore dans les arbres.

Jean-Luc

Le 14/06/2010 00:43, Jacques Melot a écrit :
 Le 13/06/10, à 15:08 +0200, nous recevions de Jean-Luc BLARY :

Le 13/06/2010 13:58, Jacques Melot a écrit :
[typo] Re : et/ou

   Tous les emplois prétendument raisonnables de « et/ou » reposent sur la prémisse définitivement fausse comme quoi la conjonction de coordination ou est exclusive.

Perso, j'évite d'employer et/ou si ça ne paraît pas nécessaire,


[J. M.]   Ce n'est jamais nécessaire.


mais ça permet de lever un risque d'ambiguïté au cas où le lecteur traiterait "ou" comme exclusive dans le contexte.


[J. M.]   En fait, vous ne nous dites là rien d'autre que vous faites partie de ceux emploient « et/ou » !

   Tout texte qui serait irrémédiablement ambigu si l'on s'en tient aux ressources du français correct pour le rédiger, le resterait en recourant à « et/ou » ou tout autre artifice. Du reste, si le rédacteur vient à s'interroger sur l'ambiguïté possible d'une phrase, modifier cette dernière en ajustant le texte pour y introduire « et/ou » - à commencer par se demander s'il doit le faire - n'est pas une entreprise moindre que celle qui consiste à tourner la phrase autrement, comme, par exemple, lorsqu'on a commencé par écrire un « il prend son chapeau » et qu'on s'aperçoit qu'il y aura ambiguïté possible sur le possesseur. Au demeurant, nous modifions fréquemment et spontanément des formulations ambiguës ou qui pourraient l'être et qui, comme dans l'exemple précédent (pron. possessif son), n'ont rien à voir avec la conjonction de coordination ou. Personne ne s'en trouve mal, car il s'agit là de l'exercice on ne peut plus normal de la langue. On ne voit pas pourquoi la conjonction ou devrait faire exception.

   Non, le meilleur service à rendre au lecteur, pour ce qui est de la compréhension d'un texte, est de rédiger ce dernier en français correct, donc sans y introduire de symboles qui, comme tels, demandent à être déchiffrés, tant soit peu. Le faire, ralentit la lecture et est la porte ouverte à des erreurs d'interprétation, quoi que vous ayez l'air convaincu du contraire. A cela s'ajoute que la compréhension d'un texte comportant « et/ou », contrairement à ce qui se passe avec la conjonction ou, nécessite l'application d'une règle d'une rigidité toute mécanique, parce que de nature mathématique, comme ce qui se mêle au langage courant lorsqu'on fait une opération arithmétique.

   L'usage de « et/ou » nécessite une compétence qui sort du domaine du langage courant, compétence qui vient se substituer à celle dans l'utilisation normale de la conjonction de coordination ou, au point qu'on finisse par ne plus savoir employer cette dernière correctement ou sans hésitation. Ce « désapprentissage » étant incompatible avec la spontanéité qui caractérise le langage courant, la conjonction sur laquelle on hésite est remplacée par une sorte de joker, à savoir la barre oblique (/), symbole indéniablement de plus en plus fréquemment utilisé à la place de la conjonction qui s'impose et qui semble dire au lecteur : « S'en débrouille qui peut ! A vous de trouvez la bonne conjonction... si vous y parvenez ». C'est ainsi qu'on affaiblit le pouvoir de communication de la langue et rend les gens dyslexiques ou, du moins, renforce ce syndrome chez ceux que le présentent déjà. En fait, au-delà de son inanité et des lourdeurs qui en résultent, c'est là la conséquence la plus grave de l'usage de « et/ou » : il entraîne indirectement une grave altération des mécanismes de la langue. A lui seul, « et/ou », pour pouvoir être utilisé, oblige souvent à reconstruire plus ou moins complètement la phrase, donnant lieu à des constructions syntaxiques peu naturelles, pour ne pas dire tout à fait artificielles et qui ne peuvent en aucun cas être considérées comme du français correct.


Car le rédacteur n'est pas dans la tête du lecteur.


[J. M.]   Il n'est rien cependant que nous rédigions sans nous mettre à la place de ceux à qui nous destinons notre texte, que nous le fassions consciemment ou non. Quand vous destinez un texte à un enfant de huit ans, par exemple, il n'est pas un instant où vous perdez de vue le style adopté pour la circonstance, sans pour autant y penser consciemment.


Et en littérature, je proscris totalement le et/ou, vu qu'il est toujours possible de tourner la phrase d'une manière plusŠ sympathique :
« Pain ou croissant ? Ou les deux ? »


[J. M.]   C'est là est une formation emphatique, qui, contrairement à ce que votre exemple semble vouloir montrer, n'a rien de nécessaire si le contexte ne suggère aucune exclusion. Dans ce cas, l'_expression_ correcte est simplement « Pain ou croissant ? ». Cela dit, il faut se méfier de tous ces exemples ad hoc.

   Jacques Melot


Jean-Luc