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Message : Re: [typo] Goethe

(Yoann LE BARS) - Vendredi 02 Septembre 2016
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Subject:    Re: [typo] Goethe
Date:    Fri, 2 Sep 2016 05:36:37 +0200
From:    Yoann LE BARS <yoann@xxxxxxxxxxx>

	Salut à tous !

Le 01/09/2016 à 23:41, Thierry Huwart a écrit :
> Bravo!

	Aïe ! Il ne faut pas m’encourager, sinon je vais continuer !

> En effet, il ne faut pas oublier que l'unification de la langue sur nos territoires est (très) récente. Le wallon a disparu peu à peu de nos campagnes belges il y a +/- 50 ans et le flamand, qui crispe les nationalismes au Nord de notre pays, finira par disparaître, n'en déplaise à ceux qui attisent les crispations communautaires. Nos voisins "de l'autre côté des champs de patates" ont simplement du retard dans l'unification, mais cela viendra.

	Justement, je viens de passer deux ans en Belgique. Toutefois, je ne
vais pas m’aventurer sur les tensions linguistico-politiques de la
Belgique – même si elles m’apparaissent très largement artificielles.

	Cela dit, le Français est effectivement une langue fortement normée,
probablement une des plus normées d’Europe. En France, il s’agit
d’ailleurs d’un enjeu politique et lorsque Richelieu a créé l’Académie
française, il avait notamment un dessein politique en tête. Toutefois,
cette normalisation n’a pas, loin de là, annihilé les variantes locales
et sociales.

	Par exemple, puisque vous semblez wallon, les usages du Français en
Wallonie ont beaucoup d’éléments qui vont laisser perplexe un locuteur
provenant par exemple de région parisienne. Le cas le plus connu est
l’usage de « septante » et « nonante », mais ce n’est vraiment pas le
plus significatif. Par exemple, l’usage de « savoir » là où dans la
plupart des variantes linguistiques du territoire français on utilise
« pouvoir » est source de très nombreuses confusions. Je me suis
d’ailleurs rendu compte qu’il était bien plus difficile de s’adapter à
une telle différence qu’à une langue étrangère : les phrases ainsi
formées ont bien un sens dans la variante linguistique qui constitue ma
langue natale, il se trouve simplement que ce sens n’est pas le même que
dans les variantes linguistiques de Wallonie. Il ressort que l’habitude
à sa langue natale est trop grande pour pouvoir véritablement en faire
abstraction lorsque l’on est confronté à une autre variante linguistique.

	On peut également citer le fait que les « w » sont prononcés de manière
différente dans les variantes dialectales de Wallonie que dans la
plupart des variantes dialectales du territoire français. Cela peut
conduire à de vraies incompréhensions. Notons cependant que j’ai trouvé
beaucoup plus facile de s’adapter à cela (quelques jours) qu’à l’usage
de « savoir » – auquel donc, sans mauvaise volonté, je n’ai jamais pu
m’habituer.

	L’important usage d’anglicismes – certes moins qu’au Québec, mais tout
de même fortement présents – a également de quoi décontenancer une
personne originaire de France.

	Plus encore, la Wallonie demeure une zone de forte variabilité
linguistique, au point qu’une personne un peu habitué sera en mesure de
déterminer assez facilement si son interlocuteur vient, par exemple, de
Bruxelles, Namur ou Liège, ceci simplement en écoutant son usage du
Français.

	Les divers Flamands, pour leurs parts, sont un ensemble de variants
linguistiques dérivant du Néerlandais et relativement
inter-compréhensible avec lui, même si un locuteur du Néerlandais
standard trouvera souvent les divers Flamands agrammaticaux. Les
disparités locales flamandes sont d’ailleurs fortes, plus qu’entre les
variantes du Français.

	Cela dit, toutes les langues finissent par disparaître. Il en sera de
même du Français, qui finira par être remplacé par autre chose.

	En tout cas, l’Allemand dispose d’une vraie norme, à laquelle on peut
se référer. Bien plus que l’Anglais, pour lequel il n’y a pas vraiment
de standard qui s’impose – personnellement, j’essaye de me baser sur ce
qui se fait à Oxford, mais d’autres choix sont possibles.

	Tout ceci posé, une norme est utile car elle permet de s’entendre
lorsque l’on désire bien se faire comprendre d’un maximum de locuteurs.
Cela permet également aux correcteurs de savoir dans quel sens réaliser
leurs corrections. Cependant, elle ne rend pas illégitime les variantes
linguistiques. De toute façon, une langue qui n’évolue plus est une
langue morte.

	Tiens, puisque j’ai déjà cité Linguisticae, voici sa présentation des
normes et des usages :

https://www.youtube.com/watch?v=C3rDVBm0OXE

	À bientôt.

-- 
Yoann LE BARS
http://le-bars.net/yoann/
Diaspora* : ylebars@xxxxxxxxxxxxxxx