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Message : Re: [typo] Le ou la Covid-19 ?...

(Thierry Bouche) - Vendredi 08 Mai 2020
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Subject:    Re: [typo] Le ou la Covid-19 ?...
Date:    Fri, 08 May 2020 00:10:43 +0200
From:    Thierry Bouche <thierry.bouche@xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx>

Bonsoir,

C'est assez rigolo d'assister à votre discussion, mais avez-vous conscience qu'elle n'a absolument aucun rapport avec la typographie ? 

Th. B.

Le 7 mai 2020 23:26:50 GMT+02:00, Yoann LE BARS <yoann@xxxxxxxxxxx> a écrit :
>
>	Salut à tous !
>
>Le 07/05/2020 à 21:17, Jacques Melot a écrit :
>> D'une part, l'usage dans la
>> langue commune leur fournira le masculin -- après tout, le nom d'une
>> maladie n'est pas nécessairement féminin -- ou ils adopteront le
>féminin
>> et ce ne pourra être que sur la base d'un raisonnement. C'est là que
>ça
>> se corse ou, plus exactement se gâte, car le fait que le/d/ de
>« covid »
>> soit mis pour « maladie » dans la langue à laquelle on emprunte
>> l'acronyme ne justifie en rien que ce dernier doit ipso facto être
>> considéré comme féminin.
>
>	Tout à fait. Cet argument fonctionne également pour le masculin.
>Clairement, le genre est ici arbitraire.
>
>	Tout de même, je pense que l’on perd de vue certaines choses. Tout
>d’abord, avant d’entrer dans le langage courant, Covid-19 est un terme
>qui a été utilisé dans un domaine spécialisé. Dans ce domaine, pour
>autant que j’ai pu en juger, l’usage a d’abord été d’user du féminin,
>raison pour laquelle, par exemple, j’use du féminin. De plus, je pense
>qu’il ne faut pas perdre de vue la consistance : pour reprendre mon
>exemple, même si je suis persuadé que l’usage va consacrer le masculin
>et que ça ne me pose aucun problème, je n’ai pour l’instant pas basculé
>vers le masculin pour conserver une consistance dans mes publications.
>
>	De toute façon, en l’espèce le choix du masculin ou du féminin est
>clairement un arbitraire et c’est très bien. Le raisonnement savant
>n’est qu’une rationalisation après coup, qui fonctionnerait tout aussi
>bien si l’usage avait consacré l’autre genre.
>
>>    La question se pose car, comme certains l'ont rappelé, un des noms
>> possibles de la maladie est/syndrome respiratoire aigu sévère/
>
>	Pour autant que je sache, il s’agit d’un message que j’ai envoyé le 17
>avril 2020 à 17 h 41, où je faisais remarquer que la Covid-19 n’était
>pas une grippe, mais un syndrome respiratoire aigu sévère. Au
>demeurant,
>les noms de virus et de maladies sont standardisés et en l’espèce le
>virus est nommé SARS-CoV-2, tandis que la maladie est appelée Covid-19.
>Sur ce point, il n’y a pas d’ambiguïté.
>
>> De « maladie », un féminin, nous passons à
>> « syndrome », un masculin, le SRAS-CoV-2
>
>	Par exemple, ici vous faites une erreur très dommageable à la
>communication : le SARS-CoV-2 n’est pas une maladie, c’est un virus.
>C’est un point essentiel, j’y reviens.
>
>> soit, une fois développé,
>> « *le* syndrome respiratoire aigu sévère dû au [virus] CoV-2 »
>
>	Non. Une fois développé, c’est « deuxième coronavirus provoquant un
>syndrome respiratoire aigu sévère ». Encore une fois, SARS-CoV-2
>désigne
>un virus, pas une maladie.
>
>	La maladie s’appelle Covid-19, soit une fois développée « maladie à
>coronavirus de 2019 ».
>
>	Clairement, là-dessus il y a une grosse erreur de départ, qui pose de
>gros problèmes – je vous l’ai dit, j’y reviens plus bas.
>
>>    D'un point de vue linguistique, en français courant, « covid-19 »
>est
>> de fait le signifiant associé à un signifié, lequel signifié est en
>> l'occurrence un virus.
>
>	Là, par contre, je me pose en faux. Le signifiant Covid-19 désigne le
>signifié maladie à coronavirus de 2019, pas le virus lui-même. Alors,
>oui, l’erreur est souvent faite, mais en l’espèce il est *nécessaire*
>de
>ne pas la propager. Cette erreur est *très* dangereuse. Voici pourquoi
>:
>
>	Par exemple, si une grande partie du mécanisme n’est pas entièrement
>élucidé, on peut dire sans trop s’avancer que si la Covid-19 est
>provoquée par l’action du SARS-CoV-2, son évolution n’est pas
>uniquement
>due à cette action du virus.
>
>	Si, dans la phrase précédente, on remplace « la Covid-19 » par « le
>Covid-19 » ou « le SARS-CoV-2 » par « la SARS-CoV-2 », la phrase reste
>tout aussi intelligible, choisissez la variante qui vous plaît. En
>revanche, voici ce qu’il advient lorsque l’on fait l’amalgame entre
>virus et maladie :
>
>	« Par exemple, si une grande partie du mécanisme n’est pas entièrement
>élucidé, on peut dire sans trop s’avancer que si la Covid-19 est
>provoquée par l’action du Covid-19, son évolution n’est pas uniquement
>due à cette action du virus. »
>
>	Immédiatement, c’est beaucoup moins clair et la communication devient
>très opaque. Ce qui est fortement délétère.
>
>	Il est vraiment essentiel de bien séparer le virus de la maladie qu’il
>provoque, car le mécanisme d’une maladie implique d’autres éléments que
>la seule action du virus. Pour prendre un exemple que tout le monde
>connaît, l’action du VIH est la cause première d’un effondrement du
>système immunitaire, lequel effondrement est appelé SIDA. Au demeurant,
>ce n’est pas le VIH qui tue, mais les infections opportunistes qui
>profitent de cet effondrement. C’est une des raisons pour lesquelles
>les
>trithérapies sont d’autant plus efficaces qu’elles commencent
>rapidement
>après l’infection au virus : au plus tôt la prise en charge est-elle
>effectuée, au moins le système immunitaire aura été éprouvé.
>
>	Cette distinction entre maladie et virus est très loin d’être
>anecdotique, notamment dans la situation actuelle. Ainsi, au moment où
>j’écris ces lignes, nous ne disposons pas d’un traitement permettant de
>contrecarrer l’action du SARS-CoV-2. En revanche, on sait prendre en
>charge la détresse respiratoire ainsi que les autres symptômes de la
>Covid-19, ainsi que leurs conséquences. Or, dans la mesure où il a été
>intégré que l’on n’est pas en mesure de contrecarrer l’action du
>SARS-CoV-2, une partie du public en a déduit que l’on ne fait rien
>contre la Covid-19. C’est non seulement extrêmement irrespectueux de
>l’effort de titan fourni par le personnel de santé, mais également
>produit des raisonnements très dangereux, où certains sont prêt à
>administrer n’importe quoi au motif que ce serait mieux que de ne rien
>faire. Or, administrer une substance sans savoir quels peuvent en être
>les conséquences est bien plus dangereux que de se contenter d’un prise
>en charge déjà bonne.
>
>	Autours de la Covid-19, la communication a été très mauvaise et cause
>de nombreux problèmes. Cette communication dangereuse a été notamment
>le
>fait d’individus qui se déclaraient d’une communication scientifique.
>Il
>n’en demeure pas moins que c’est la cause d’attitudes dangereuses.
>
>	Alors, oui, la confusion entre virus et maladie est une erreur
>répandue. Cette erreur est extrêmement dangereuse : rien ne justifie de
>la propager.
>
>	Après, la question du genre, vraiment, on s’en moque…
>
>	À bientôt.

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Institut Fourier & cellule Mathdoc
Université Grenoble Alpes