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Message : Re: traditionS typographiqueS (Olivier RANDIER) - Lundi 17 Mars 1997 |
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Subject: | Re: traditionS typographiqueS |
Date: | Mon, 17 Mar 1997 03:09:21 +0100 |
From: | orandier@xxxxxxxxxxxxxxxxxxx (Olivier RANDIER) |
>je suis désolé de te dire que tu confonds capitales et petites >capitales, les petites capitales n'ont pas la même forme, ni les mêmes >approches que les capitales. Les capitales sont dessinées pour >cohabiter avec des bas de casse, il est donc inévitable d'avoir à >faire des corrections pour composer des mots en capitales, >interlettrer les capitales par exemple dans un titre est une chose >normale, souvent nécessaire (en particulier, même si on n'espace pas >beaucoup, des lettres comme I posent un pb analogue au chiffre 1, qui >demandent des ajustements). Les petites capitales apparaissent en deux >endroits, comme intertitres, en-têtes, bref en temps que titrage, où >il est souvent de bon ton de les interlettrer ; mais aussi dans le >texte pour les usages qu'a évoqué J. André, et là les interlettrer >comme des capitales serait à mon avis une erreur (je viens de poster >un article sur comp.fonts émettant l'hypothèse que ces deux usages >correspondraient précisément à deux traditions typo distinctes >(anglo-saxones vs. latine) : on va voir ce qu'on m'y répond). Concernant ce problème de l'interlettrage des (petites) capitales selon les traditions anglo-saxones, je pense qu'il y a sans doute là, de la part des anglais (ou plutôt des américains), une confusion qui peut tenir, d'une part, à des problèmes de traduction d'ouvrages d'origine française, d'autre part, à une différence très importante entre les conceptions de l'interlettrage selon que l'on parle du plomb ou des systèmes informatiques de composition. >Les capitales sont dessinées pour cohabiter avec des bas de casse, il est donc >inévitable d'avoir à faire des corrections pour composer des mots en capitales. Ceci est vrai au plomb : il faut bien comprendre qu'au plomb, une approche de paire négative est - physiquement - impossible. Chaque lettre a une chasse physique incompressible, matérialisée par la largeur du poinçon. Pour obtenir un interlettrage naturel, la seule solution est donc de calculer la largeur des poinçons au plus juste, et de compenser par des blancs d'approche supplémentaires chaque fois que c'est nécessaire. Cette chasse étant calculée pour faire cohabiter les capitales avec les bas-de-casse (car c'est là leur usage le plus fréquent), il est inévitable d'avoir à ajouter de façon systématique des blancs d'approche entre chaque lettre d'un texte en capitales, de façon à retrouver un interlettrage naturel, sinon, les capitales ayant un encombrement plus important, elles paraîtraient trop serrées. Mais cet "interlettrage", à mon sens, constitue simplement une correction équivalente à l'approche de paire naturelle. Je pense que là, il a pu y avoir confusion dans les termes utilisés par les anglo-saxons et les latins, les français ayant une longue tradition de codification typographique, ce qui n'est pas, il me semble, le cas des anglo-saxons. Une traduction incorrecte (dû à l'extrème confusion de la terminologie typographique, entre interlettrage et approche tout court [tracking], approche de paire ou interlettrage naturel [kerning]) a donc pu se transmettre aux anglo-saxons, donnant lieu à une tradition particulière aux anglo-saxons, qui nous est incompréhensible. En composition informatique, au contraire, le crénage utilise aussi bien des valeurs d'approche de paire négatives que positives. La chasse de chaque caractère est donc calculée afin de nécessiter le moins de corrections possibles (d'autant plus que tous les logiciels ne savent pas exploiter les tables d'approche de paires). On rajoute ensuite des valeurs positives ou négatives à la table d'approches de paires, pour obtenir un interlettrage naturel. Ces corrections sont effectuées pour autant de lettres que le créateur le jugent nécessaire, y compris, la plupart du temps, pour les capitales (au moins pour les fontes de bonne qualité). Il n'y a donc pas lieu de rajouter à ce crénage une approche superfétatoire, les corrections ayant déjà été effectuées par l'auteur du type (qui est en principe meilleur juge que nous). Quant à une approche des capitales dans les titres, sous-titres, pour des raisons esthétiques, elle est de l'entière responsabilité du typographe. Pour ajouter à la confusion, il faut ajouter que, pour des raisons optiques, l'approche générale d'un texte varie en fonction du corps de celui-ci, raisons pour lesquelles un titre (en caps, donc) en corps 48 n'aura pas la même approche générale que des petites capitales en corps 9. Là encore, ce devait être fait manuellement au plomb, alors que ces corrections sont faites automatiquement sur un système informatique (cf., par exemple, dans XPress, l'item "approche de groupe"). Enfin, pour de gros titres, on aura avantageusement recours à des "titling capitales", si celles-ci existent dans la police désirée. Ces capitales sont entièrement redessinées pour tenir compte de corrections optiques nécessaires dans les grands corps (sérifs plus léger, pleins et déliés plus subtils et plus fins, etc.). >les petites capitales n'ont pas la même forme, ni les mêmes approches que >les >capitales. Là, je pense qu'il faut voir à distinguer entre la lettre et l'esprit du Code. Le principe général des petites capitales, c'est que ce sont des capitales de la hauteur d'oeil des bas-de-casse, et de la même graisse RELATIVE. Parce que si on se contente d'utiliser des caps d'un plus petit corps, la réduction aboutit à une graisse sensiblement plus faible que celle des bas-de-casse, ce qui affaiblit le gris typographique. Dans le meilleur des cas, au plomb, l'auteur de la fonte a dessiné des petites caps tenant compte des corrections optiques nécessaires. Mais je soupçonne que, bien souvent, le typographe a dû avoir recours à des caps d'un corps inférieur, mais d'une graisse supérieure (comme suggéré ici comme alternative aux petites caps automatiques sur Mac). Mises à part les corrections optiques dues à un corps inférieur, les petites caps sont censées avoir la même forme que les capitales de la même graisse relative. Ceci pourrait donc très bien être géré par une technologie du type MultipleMaster : détermination de la hauteur d'oeil des bas-de-casse et de leur graisse relative, génération de capitales de corps et de graisse adaptées (axe graisse et corps en MultipleMaster). Quant à la question des petites capitales légèrement plus grandes que le "n" bas-de-casse évoquée précédement, je crois que cela tient simplement au fait que le nombre de corps disponibles au plomb est forcément limité. En l'absence de petites caps dans la police désirée, le typographe était forcé d'avoir recours à des caps d'un plus petit corps, mais, étant donné que le rapport d'hauteur d'oeil entre capitales et bas-de-casse n'est pas fixe, il ne pouvait pas toujours tomber "pile-poil". Je présume donc qu'on préférait, dans ce cas, utiliser des petites caps trop grandes que trop petites (parce que c'est moins choquant)... Pour finir, et afin d'éviter de continuer d'entretenir des confusions très dommageables pour les traditions typographiques anglo-saxones ;-), je propose d'employer une terminologie claire : approche pour l'espacement général entre les lettres (équivalent de tracking, en anglais), et crénage pour les corrections d'approche de paires (kerning), et de proscrire interlettrage, pas clair, typographiquement incorrect et source de confusion. Olivier Randier - Experluette
- traditionS typographiqueS, Thierry Bouche (14/03/1997)
- <Possible follow-ups>
- traditionS typographiqueS, Paul Pichaureau (14/03/1997)
- Re: traditionS typographiqueS, Olivier RANDIER <=
- Re: traditionS typographiqueS, Jonathan Paterson (17/03/1997)