Archive Liste Typographie
Message : Re: oblique-slashe-italique

(Olivier RANDIER) - Samedi 18 Décembre 1999
Navigation par date [ Précédent    Index    Suivant ]
Navigation par sujet [ Précédent    Index    Suivant ]

Subject:    Re: oblique-slashe-italique
Date:    Sat, 18 Dec 1999 22:45:11 +0100
From:    Olivier RANDIER <orandier@xxxxxxxxxxx>


>Voilà qui suggère qu'une fonte qui ne diffère de sa version romaine
>que par l'inclinaison systématique de ses caractères ne serait pas
>une véritable fonte italique ! Dans ce cas d'espèce, je crois pour ma
>part qu'il ne s'agit pas d'une fonte oblicisée ou penchée mais
>véritablement d'une fonte italique (obtenue par simple oblicisation).
>La décision du créateur de la fonte de simplement pencher les
>caractères pour créer une version italique peut nous paraître un
>déplorable pis-aller mais demeure une prérogative de l'artiste qui
>n'a d'ailleurs ni obligation de moyens ni obligation de résultats.

Je ne nie pas que faire un oblique au lieu d'un italique soit une
prérogative de l'artiste. Je ne fais pas de ce terme un jugement de valeur
(contrairement à oblicisé ou italisé). Reste qu'un italique, c'est à
l'origine une fonte « dans le style italien », c'est-à-dire dont le dessin
est radicalement différent du romain. On a besoin d'un terme pour
distinguer les deux façons de faire. Par exemple, l'Optima comporte un
italique vrai (numérisé après coup d'après les dessins de Zapf) ou un
oblique selon la date à laquelle on a acheté la fonte. Donc, je dis
"Garamond italique", mais "Vendôme oblique", "Futura oblique", mais "Gill
italique". D'ailleurs, il semble que je ne sois pas le seul, regardez le
nom de ces fontes chez Adobe.
D'autre part, cette notion ne s'applique pas uniquement aux fontes dans
leur ensemble, mais également aux caractères. Un certain nombre de ceux-ci
ont un glyphe traditionnellement totalement différent en romain et en
italique : a, f, g. Il est important pour le créateur de caractères de
pouvoir distinguer un a oblique d'un a italique.

Loin de moi l'idée de vous reprocher votre orthodoxie, ayant moi-même la même propension. Je crois néanmoins que vous préconisez des règles trop rigides en faisant de la désignation « italique » une sorte d'appellation d'origine contrôlée. Vous signalez à juste titre qu'un fonte italique, c'est à l'origine une fonte « dans le style italien». La première caractéristique (certains diront la principale caractéristique) de ce style n'est-elle pas le fait d'être penché ? Combien d'autres caractéristiques faudrait-il posséder pour être italique de plein droit ?
<<<<
Je crois qu'on ne parle pas de la même chose : la fonction sémantique d'italique est remplie de la même façon par un oblique que par un italique. La distinction que je fais est stylistique.
Une fonte oblique est simplement penchée. Une fonte italique possède en plus un caractère de cursivité spécifique, qui en fait, stricto sensu, un caractère différent du romain. Certains styles (humanes, garaldes, didones) n'ont jamais d'oblique, sauf exception (le Vendôme), d'autres (mécanes, linéales "even proportions") n'ont jamais d'italique. On peut dater précisément l'apparition des obliques modernes : elles se sont imposées avec les mécanes.
Je suis d'accord que la distinction oblique/italique n'a pas d'utilité pour l'enrichissement typographique. Il va de soi que je dis "ceci est à mettre en italique" même si le corps du texte est en Futura. Par contre, en tant que dessinateur de caractère, cette distinction m'est utile, et j'y tiens.
Notamment parce que dessiner un italique prend beaucoup plus de temps que dessiner un oblique...
>>>>
D'autre part, il ne faudrait pas éluder le problème qui surgit lorsque seulement une partie des glyphes d'une fonte sont canoniquement dans le« style italien ».
<<<<
Même si tous les glyphes ne sont pas italiques, il est facile de distinguer un oblique d'un italique. Dans une fonte à empattement, ceux-ci disparaissent au profit d'un trait d'attaque et d'un trait de sortie, comme dans un script. Dans une fonte sans empattement, la cursivité de certains glyphes, et, surtout, la présence d'une descendante au f signe à coup sûr l'italique.
Regardez l'italique du Vendôme dans la dernière lettre Gutenberg : pas de descendante au f, empattements "romains" ; c'est un oblique, même si chaque signe est redessiné. Comparez un Gill et un Futura. Le Gill a un italique (très beau). Le Futura a un oblique et je n'imagine pas un Futura italique, ça n'aurait pas de sens par rapport au principe même qui fonde le Futura.
Un autre glyphe qui signe l'oblique, c'est le g. Faites le test : si le g du romain a la forme du g italique, alors, presqu'à coup sûr, l'italique sera un oblique.
>>>>
Je crois personnellement que le choix d'Adobe d'introduire des fontes « oblique » répond(ait?) simplement à des impératifs commerciaux. Une fonte sans version italique se vend mal. Alors, on en crée une mécaniquement et, pour éviter les problèmes de nomenclature lors de la venue éventuelle d'une version italique plus largement dans le style italien (on doit s'être souvenu de l'imbroglios Optima chez Adobe), on nomme cette première version « oblique ». La très vaste majorité des acheteurs ne fait pas de distinction entre les désignations « oblique » et « italique ». Tout le monde (ou presque) est donc satisfait et lorsqu'une version italique de qualité est éventuellement disponible, on peut la vendre sans gène à l'égard des acheteurs de la première génération. J'y pense, c'est comme pour les logiciels !

Ça me paraît un peu paranoïaque, comme conception. L'usage du terme oblique est antérieur à l'« affaire Optima ». Quand un typographe conçoit une fonte, il conçoit généralement l'italique en même temps. Si Adobe voulait tromper ses utilisateurs, il lui suffirait d'appeler tous les caractères penchés italique,
99,99 % des utilisateurs n'y verrait que du feu. Personnellement, je trouve ça pratique, ça me permet de voir tout de suite quels caractères seront efficaces en labeur. J'aimerai que tous les fondeurs fassent preuve d'autant de rigueur dans leur nomenclature.
Olivier RANDIER -- Experluette mailto:orandier@xxxxxxxxxxx
http://technopole.le-village.com/Experluette/index.html
Experluette : typographie et technologie de composition. L'Hypercasse (projet de base de données typographique), l'Outil (ouvroir de typographie illustrative).