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Message : Re: Premier sinistre : toujours les caps

(Lacroux) - Jeudi 01 Juin 2000
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Subject:    Re: Premier sinistre : toujours les caps
Date:    Thu, 01 Jun 2000 12:22:04 +0200
From:    Lacroux <lacroux@xxxxxxxxx>

Olivier RANDIER a écrit :

> Étonnement de mon éditeur. Pour me justifier, je saisis mon hyène pour
> confondre l'impétrant... et constate avec stupeur que l'on y écrit « le
> Premier ministre ». Il y a sûrement une explication limpide et évidente,
> mais j'avoue que je patauge. JiPé, tu pourrais m'expliquer clairement
> pourquoi, là, on ne met pas de cap à ministre ?

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On ne met jamais de cap à « ministre »... sauf quand on s'adresse
personnellement à un ministre que l'on respecte ou dont on souhaite obtenir
quelque chose...
Quant au premier d'entre eux, la graphie particulière de sa fonction est
cautionnée par une tradition qui remonte loin. Qui s'étonne du Premier
consul ?
Il est vrai que c'est une entorse à une tendance lourde (« malaise face à la
décapitalisation du substantif derrière un adjectif capitalisé »)... mais elle
en respecte une autre, bien souvent contradictoire dès lors qu'il ne s'agit
plus de lieux, d'institutions ou d'événement, mais de personnes : le peu de
goût des Français républicains pour la multiplication flagorneuse des
majuscules dans la graphie des titres et des fonctions. Et puis, y a
l'équilibre institutionnel... Le président de la République n'a droit qu'à une
cap (tu me diras qu'aujourd'hui c'est encore trop...) ; en face, un « Premier
Ministre » la foutrait mal... La graphie « premier ministre » a ses partisans,
mais elle est à la fois maigrelette, ce qui n'est pas bien grave, et surtout
ambiguë : « Qui sera le premier ministre capable de réformer la
typographie ? » Cela suffit à la condamner définitivement.
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> * Encore que... J'ai quand même un (petit) problème avec les ministères :
> le « ministère des Affaires sociales » n'est-il pas un organisme unique à
> caractère national ? Certes, il y a plusieurs ministères, mais il n'y a
> qu'un seul ministère des Affaires sociales, non ?

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L'unicité est un des critères traditionnels les plus difficiles à manier,
puisqu'il n'est pas d'ordre linguistique ou typographique : il est
intégralement fondé, en supposant qu'il soit valide en toutes circonstances
(ce qui est loin d'être certain...) sur la connaissance de l'objet et en
particulier de son statut. Il ne faut faire appel à lui qu'en dernier
recours ! Avant, autant poser le problème en termes strictement
typographiques...
Si tu accordes la cap au générique, tu dois l'enlever au spécifique (sauf à
accepter de multiplier hideusement les caps)... et alors là, problème ! Tu vas
te retrouver avec un Ministère des affaires sociales et... un ministre des
Affaires sociales... Mieux, quand tu feras sauter le générique (ce qui est
fréquent avec certains grands ministères comme les Affaires étrangères ou
l'Intérieur), tu seras dans une belle merde... avec des caps sauteuses,
alternatives, incohérentes, bordéliques... Bref, tout ne va pas pour le mieux
dans le meilleur des mondes typographiques, mais avant de déplacer les bornes
anciennes que nos pères ont posées, s'agit de faire gaffe aux conséquences de
notre inconséquence pressée...
Amicalement,
Jean-Pierre Lacroux
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Bibliographies, citations (langue française, typographie) :
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Mise à jour : 20 février 2000