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Message : Re: Emphase étrangère (Jef Tombeur) - Vendredi 14 Septembre 2001 |
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Subject: | Re: Emphase étrangère |
Date: | Fri, 14 Sep 2001 14:21:17 +0200 |
From: | "Jef Tombeur" <jtombeur@xxxxxxx> |
----- Original Message ----- From: "Lacroux" <lacroux@xxxxxxxxx> To: <typographie@xxxxxxxx> Sent: Friday, September 14, 2001 11:11 AM Subject: Re: Emphase étrangère > jcdubacq@xxxxxxxxxxxxxxx a écrit : > > > Je vais le dire bêtement, mais si on le met entre guillemets, ça ne peut > > pas aider ? Et JiPé de répondre... > Ce serait une « insistance » bien particulière puisqu'elle signalerait au > lecteur que le terme ou l'expression est à prendre avec des pincettes... En effet, c'est bien l'intention de l'auteur qui emploie cette forme. Pour l'anecdote, je me suis fait un jour taper sur les doigts par un redchef adj. en raison de cet usage. Bon, en fait, à l'époque, il fallait me taper sur les doigts sous n'importe quel prétexte pour me faire comprendre qu'il était temps que je rentre dans les rangs, et j'imagine que le redchef était de parfaite mauvaise foi, connaissait cette "tournure" aussi bien que moi. Il s'agissait d'un petit texte ayant suscité l'ire d'une association d'anciens combattants dont, je crois, le seul but était d'obtenir que le quotidien m'employant la cite et cite surtout l'auteur de la protestation (cas très fréquent : on a bien compris, on fait semblant de s'indigner, en tentant de faire parler une fois de plus de soi). La phrase était du genre : que la chasse américaine ne parvienne à intercepter un second appareil, "passe encore", mais que le troisième parvienne sur cible sans coup férir, etc. Ce "passe encore" est en quelque sorte (pour moi en tout cas) une latitude laissée au lecteur de lui substituer l'expression qui lui convient le mieux, soit quelque chose comme "c'est regrettable, mais excusable", "se conçoit, bien que...", "n'étonne pas outre mesure les experts", etc. Ou, selon le contexte, ces guillemets de distanciation introduisent ici l'idée que, déjà, l'inaction au second "incident" me parait (ce que vous voudrez, depuis insolite jusqu'à stupéfiante ou inconcevable en passant par atypique...), mais que je préfère glisser afin d'attirer l'attention sur le plus significatif ou probant (une fois, "ça va", deux fois "ça passe", trois fois... "bonjour les dégâts !"). Dans le cas de "a priori" (ou "à priori"), cela laisse effectivement penser "singulier a priori", "ce n'est pas aussi évident que ça", etc. (comme l'énonce JiPé). Ainsi, dans la suite "parvienne sur cible sans coup férir est "a priori" stupéfiant", l'emploi signale que ce n'est pas si stupéfiant que ça pour diverses raisons (toujours pour l'anecdote, saviez-vous que seule l'aéronavale française était capable d'apponter de nuit il y a une petite décennie, les pilotes de l'U.S. Navy, pas plus que ceux du Marines Corps, n'étant entraînés à cela ?). Employés ainsi pour encadrer _a priori_, les guillemets introduisent une notion de paradoxe, et j'oserais, autant que de distanciation de l'auteur par rapport au sens premier, ou le plus courant, de son propos. Cet emploi est bien "à prendre avec des pincettes" parce qu'on n'est pas toujours sûr que le destinataire (par ex., le lecteur lambda d'un quotidien régional) en saisira le sens, soit l'intention du locuteur. En ce sens, mon redchef n'avait pas tout à fait tort de me le remémorer. Par ailleurs, les guillemets peuvent avoir un effet de renforcement (totalement à l'opposé de la distanciation, donc). Ainsi, dans l'énoncé, "c'est proprement "stupéfiant"", les guillemets de "stupéfiant" peuvent indiquer qu'il s'agit bien du seul terme approprié, adéquat, qu'il n'en vient pas d'autre à l'esprit, qu'il faut prendre stupéfiant à son sens "premier", le plus courant, on est (pardonnez la trivialité, sur le cul, frappé de stupeur). Jean Méron s'est interrogé sur cette question. Il préconise les guillemets doubles pour marquer les citations, les guillemets simples pour marquer une notion de "doute", d'incertitude, ou cet usage de distanciation (voir peut-être http://listetypo.free.fr/meron). Et bien sûr la citation dans la citation. Son raisonnement : puisqu'il y a des doubles et des simples, autant tirer parti des simples. La polysémie des guillemets doubles est, de fait, parfois problématique. L'origine de l'emploi des guillemets, c'est le besoin de marquer "ce qui n'appartient pas à l'auteur". Donc, si un auteur les emploie sur son propre texte, il signifie "cela ne m'appartient pas tout à fait", je m'en éloigne, etc. Dans ce cas, l'emploi de "renforcement" ne serait pas vraiment acceptable. Certains seraient assez partisans de se dispenser totalement des guillemets et de leur substituer un autre type de marquage (changer de police par ex., ainsi, voyez la Gallic de Puyfoulhoux, qui peut se substituer soit au romain, soit à l'italique). Bref, j'ai l'impression qu'à la bouffe typo, on se goinfrera encore de guilles... Sans se retrouver en guenilles après s'être battus à leur sujet, comme des chiffonniers...
- Re: Emphase étrangère, (continued)
- Re: Emphase étrangère, jcdubacq (14/09/2001)
- Re: Emphase étrangère, Lacroux (14/09/2001)
- Re: Emphase étrangère, Thierry Bouche (14/09/2001)
- Re: Emphase étrangère, Jef Tombeur <=
- Re: Emphase étrangère, Lacroux (14/09/2001)
- Désabonnement, Pierre Hallet (14/09/2001)
- Re: Désabonnement, Philippe Jallon (14/09/2001)
- Re: Désabonnement, Jacques Melot (14/09/2001)
- Re: Désabonnement [HS], Philippe Jallon (14/09/2001)
- Re: Emphase étrangère, Jef Tombeur (14/09/2001)
- Re: Emphase étrangère, Thierry Bouche (18/09/2001)