Archive Liste Typographie
Message : Re: [typo] Exclure l'inclusive? (Jacques Melot) - Mardi 23 Avril 2019 |
Navigation par date [ Précédent Index Suivant ] Navigation par sujet [ Précédent Index Suivant ] |
Subject: | Re: [typo] Exclure l'inclusive? |
Date: | Tue, 23 Apr 2019 21:40:37 +0000 |
From: | Jacques Melot <jacques.melot@xxxxxxxxx> |
Bonjour,
Le 2019-04-19 à 21:04, Amalric Oriet a écrit :
Le 19 avr. 2019 à 19:39, Thomas Linard <thlinard@xxxxxxxxx> a écrit :Que les choses soient un peu plus complexes que Clément Marot ramenant l¹accord du participe passé d¹Italie en même temps que la vérole, je le crois volontiers. Mais vous dites que « malgré les protestations de certains contemporains, ils [les premiers codificateurs du français ] ont ainsi réussi, et de manière durable, à imposer une distribution normative stricte » (je vous cite) est une « excellente illustration » de « les règles de la langue ont une vie propre et une temporalité spécifique que l¹intervention volontariste n¹a aucune chance de modifier à sa guise », c¹est bien cela ? C¹est bien votre argument ?Tout à fait. Mais ce n¹est pas moi qui dit « malgré les protestations [?] », c¹est Marie-José Béguelin. Ces propos lui appartiennent et, encore une fois, n¹ont été cités qu¹à titre purement illustratif (de l¹épaisseur de la problématique, qui ne peut se résumer à une image d¹Épinal).
J¹avais bien vu que ce n¹était pas de vous. Pardonnez-moi si j¹ai dit « je vous cite », c¹était une façon de dire en raccourci que vous citiez cet argument à l¹appui de votre thèse.
Que les hommes aient une certaine influence sur l¹évolution de leur langue ne devrait pas en soi être si surprenant. Ce qui devrait en revanche être relevé, c¹est qu¹à partir du XVIe siècle, un pressant besoin de mettre un peu de structure dans le français émergeant se fait sentir. Il ne s¹agit pas d¹une volonté précisément fixée sur un point particulier, mais d¹un élan général portant sur tous les aspects de la langue, lexique, orthographe, néologie, grammaire, syntaxe, etc., mouvement précipité (et soutenu) par les débuts de l¹imprimerie et la diffusion « à grande échelle » des textes, ainsi que, par exemple, par le besoin de s¹affranchir définitivement du latin. Il ne s¹agit donc ni de la volonté d¹un individu, ni même d¹un petit groupe d¹individus et il n¹y a pas d¹orientation a priori, sur la forme que devrait prendre telle ou telle règle. Celles-ci résultent de l¹observation de l¹usage, de l¹analyse (plus ou moins assurée) des « maîtres de la langue », de divers aléas* aussi, souvent. En outre, elles ne sortent pas tout armée et casquée de la cuisine de Jupiter, elles évoluent, sont affinées, abandonnées parfois, reprises, déclinées, etc. Typiquement, s¹agissant de l¹accord du participe passé, il faudra attendre près de 400 ans pour que la règle trouve une forme et une assise à peu près définitive (jusqu¹à la prochaine fois). Il s¹agit donc d¹une très bonne illustration que la langue a une vie propre et une temporalité spécifique que l¹intervention volontariste (d¹un petit groupe, dans un sens prédéterminé, et en un temps restreint) n¹a aucune chance de modifier à sa guise.*ce qui est exactement le cas avec les vers de Marot. Il n¹a pas voulu faire triompher une (son) idéologie. Il a répondu à un instant t à une question de François Ier ? d¹une manière plaisante ? dans le sens que lui estimait être le bon. Il se trouve que la « sauce a prise », parce que la langue (et les hommes qui la parlent) étaient prêts et disposés à accueillir une telle règle à ce moment-là. Pour une qui est restée, combien d¹autres qui sont tombées dans les oubliettes de l¹histoire parce que le moment n¹était pas venu ?
Dans le cas de Vaugelas et de son argumentaire contre l¹accord de proximité, qui plus proche de notre sujet initial, bien sûr qu¹il n¹a pas voulu faire triompher son idéologie : elle triomphait déjà. Il ne faisait qu¹énoncer l¹idéologie commune de son temps. Dupleix dit la même chose quelles années après : « le genre masculin est le plus noble » (https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k50579n/f702.image), Bouhours pareillement : « il faut que le plus noble l¹emporte » (https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k7646t/f31.image), et, au siècle suivant, Beauzée : « Le genre masculin est réputé plus noble que le féminin, à cause de la supériorité du mâle sur la femelle » (https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k84315f/f361.image).
En somme, si l¹idéologie à l¹¦uvre était sans concurrence (ou presque), pour vous c¹est de « la vie propre de la langue ». Donc, en effet, vous pouvez utiliser des arguments contraires à votre thèse à son appui, parce que vous ne voyez pas la contradiction : il y est bien question d¹une intervention volontaire pour changer la langue, mais comme la résistance rencontrée ne s¹est pas manifestée par des écrits contraires, cela vous semble relever d¹une évolution « naturelle », n¹est-ce pas ?
La liste Typo ? discussions typographiques
Les archives : https://sympa.inria.fr/sympa/arc/typographie
Désabonnement : <mailto:sympa_inria@xxxxxxxx?subject=unsubscribe%20typographie>
- Re: [typo] Exclure l'inclusive?, (continued)
- Re: [typo] Exclure l'inclusive?, Jacques Melot (20/04/2019)
- Re: [typo] Exclure l'inclusive?, Serge Paccalin (21/04/2019)
- Re: [typo] Exclure l'inclusive?, Jacques Melot (21/04/2019)
Re: [typo] Exclure l'inclusive?, Jacques Melot <= Re: [typo] Exclure l'inclusive?, Thomas Savary (24/04/2019)
- Re: [typo] Exclure l'inclusive?, Marion Gevers (24/04/2019)