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Message : Orthotypographie

(Jacques Andre) - Vendredi 27 Juin 1997
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Subject:    Orthotypographie
Date:    Fri, 27 Jun 1997 15:29:23 +0200 (MET DST)
From:    Jacques Andre <Jacques.Andre@xxxxxxxx>

Les éditions des Cendres (rue du cendrier à Paris) ont sorti un bouquin
vachement intéressant : 
Jérôme Hornschuch, _Orthoptypographia_ ... _, (ISBN : 2-86742-077-6)
qui est en fait une 
traduction fançaise du premier ouvrage à l'usage des correcteurs 
(ça date de 1608). 
C'est vachement intéressant parceque, d'une part, ça montre que dès 1600
on avait besoin de normaliser les signes de corrections (et ceux-ci ont peu
évolué depuis), mais que, d'autre part, ça montre le besoin de correcteurs
en complément des typographes (et bien sûr des auteurs).
Petit bouquin que je recommande vivemnt aux amateurs de « petits livres »
qui font les grandes bibliothèques. 
Mais faites gaffe : tirage = 499 exemplaires (qu'est-ce que c'est que ces gens 
qui ne savent même pas compter jusqu'à 500 aurait dit Prévert). 
Il en reste à La Hune, Bld St Germain à Paris.

Mais ce mot me plait ! « orthotypographie » et me hérisse tout à la fois.
Et ça ressemble vachement à cette liste typographie à tel point que je me 
demande si nous ne devrions pas en changer le nom pour "orthotypo".
 Ortho, ça veut dire norme, casque à pointe dirait Ladislas Mandell, 
et ce n'est pas un hasard si cet _orthotypographia_ a été écrite par un  
germain (1608 je répète).

Il y a une typographie française, il y a des typographies pour chaque culture.
Mais aussi pour des périodes (voire pour des medias ; les échanges d'il y
a 3 mois et des jours derniers sur les smileys le montrent bien : 
même si j'ai été  le premier à dire que les smileys c'est les points d'ironie
ratés dans la typo française, c'est quand meme qq chose qui existe. 
Je n'utilise pas beaucoup ça mais je conçois qu'on les emploie
ici dans ce genre de listes, news, etc. qui ont une forme d'écriture
nouvelle. Alors pourquoi pas de nouveaux symboles ?
Qui a raison ?

En fait le mot, employé récemment par notre « Islandais », qui me
choque le plus est celui d'aliénation. À mon avis, il ne faut pas confondre
  - le fait d'uitliser la typo américaine parce que ça fait bien,
  - le fait d'utiliser la typo amricaine parce que c'est celle que 
    l'on voit, chez nous, le plus souvent et que l'on croit que c'est
    la norme,
  - le fait d'utiliser la typo américaine parce que les produits américains
    sont les plus faciles à utiliser (voire les seuls disponibles),
  - le fait d'utiliser certains concepts de la typographie amréricaine quand 
    on pense que c'est un mieux (même si américaine).

Je veux bien utiliser le mot aliénation dans les premiers sens, mais 
je ne poense pas être aliéné quand je trouve que le tiret d'1/2 cadratin
avec une graisse « normale »  a qq utilité. Jean Mauvais, prof à l'École Estiene)
m'a expliqué que, du temps du plomb,  les tirets étaient indépendants des 
fontes, c.a.d. que les tirets vendus avec le Garamond, le Robusta ou je ne
sais quel Didot, Times etc. étaient les mêmes quelles que soient les fontes.
Donc indéoendant des graisses, approches, etc.
Si aujourd'hui, on essaye d'harmoniser les tirets (je veux dire adapter
les graisses et les métriques des tirets par rapport au style du
caractère) n'est-ce pas un mieux ? et si qui plus est on essaye d'hamroniser
la longueur de ces tirets à une certaine image que l'on se fait du gris de la
page, où est le mal d'utiliser des tirets 1/2 cadratins ? Ils n'existaient
pas, certes. Mais ils existent en 1997. 
Pourquoi s'en priver quand on est convaincu que c'est mieux ?

La typographie française ça veut dire quoi ? Celle de Gutenberg (Strasbourg,
1400 et quelques), celle de Bechtel, de Fournier, de Didot, de Rey,
de Baudin, de Vox,  etc. ? Il n'y a pas de LOI française -- et je trouve dommage
que l'ouvage de l'Imprimerie nationale, jouant trop sur son nom et son histoire
à croire que puisque l'Imprimerie royale avait tous les droits, la nouvelle
Imprimerie nationale, société privatisée, a notamment le
droit de décider du français, que cette In donc ait employé le terme de
« Règles  » alors que le titre devrait être simplement « Usages » 
-- si vous ne m'avez pas compris : l'Imprimerie nationale n'a pas, en 1997, 
de droit divin, royal ou gouvernemental de décider de l'usage des accents sur 
les capitales, fussent-elles des voyelles).

Personne d'ailleurs n'a de droit sur ce sujet, contrairement aux mots qui
relèvent de l'Académie et de l'orthograohe qui relève de tellement d'organismes
que ça fait plutôt rigoler dans le landerneau du coin.

Bon, Fernand Baudin n'est pas français, il est belge, comme Raimbaud,
Grevisse ou Brell. Il a quand même droit à la parole en matière de
typographie française (et lorsqu'il prend la parole, même s'il sait
être truculent, il a quand meme le pouvoir de dire des vérités qui
souvent font réfléchir : c'est le fond de son _Effet Gutenberg_ gros livre
où il y a beaucoup plus de questions, ou de remises en questions, que
de vérités absolues). Pour lui donc, il y a évolution. Un de ses
exemples favoris est celui de la « règle » des divisions de mots. La
typographie française dit que l'on ne doit pas terminer plusieurs (3?)
lignes de suite par des divisions (-). D'où ça vient ? D'un Didot.
N'empèche que Gutenberg, Fournier, Didot père, etc. le faisaient.

Petite remarque en passant : la typographie française est plutôt définie
par des interdits (on en epout pas faure ci, dans tel pays on fait ça,
etc.) ce qui laisse donc supposer que le non non-dit est bon ?

Ma question est alors : quel est le canon de la typographie française ?
Gutenberg ? Garamond, Fournier ? Frey ?
et s'il n'y en a pas (ce que je crois), alors il est interdit d'interdire
(ça c'est mon côté 68ard). En revanche, il y a une typoragphie
française qui est basée sur les nuances, le goût, la réflexion, l'évolution
et la tolérance. Mais ni sur l'aliénation, ni sur l'intégrisme.

 Jacques Andre          email: jandre@xxxxxxxx
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