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Message : RE: Re : [typo] accent

(Armelle Domenach) - Vendredi 20 Mai 2005
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Subject:    RE: Re : [typo] accent
Date:    Fri, 20 May 2005 10:21:32 +0200
From:    "Armelle Domenach" <armelle.domenach@xxxxxxxxxxxx>

Aïe, aïe, aïe, l'approche des caps anglo-saxonne versus l'approche
française, çà va faire des dégâts sur la liste, çA!
En tt cas, bravo pour cette démonstration ou... cette conclusion liminaire
(?) anti "chacun sa sauce"!.

-----Message d'origine-----
De : Thierry Bouche [mailto:thierry.bouche@xxxxxxxxxxxxxxx]
Envoyé : vendredi 20 mai 2005 09:47
À : typographie@xxxxxxxxxxxxxx
Objet : Re: Re : [typo] accent


La lapidarité de ma réponse venait du fait que je n'ai pas non plus
envie de reproduire ce débat largement stérile. Les positions sont
connues, archivées, qu'on s'y réfère ! (À noter tout de même que les
deux écoles sont représentées en gros sur cette liste par Melot-Roberts
d'une part, le reste du monde d'autre part, mais le bon choix pour ce
type de questions ne s'obtient pas par référendum, sinon il est évident
qu'il faudrait écrire une fois pour toutes 16ème !)

Je ne reviens donc que sur un point, qui me semble avoir son importance.


Le vendredi 20 mai 2005 vers 08:09:10, Jean-François Roberts écrivait :

JF> Simplement, ne prétendez pas qu'il y ait là une quelconque nécessité
JF> (prétendument, pour désambiguïser un texte, ou un mot) - sauf pour 1
JF> % des cas de tout-cap. (mode marginal en tout état de cause).

là, j'en perds mon latin de cuisine orthotypographicum. La complexité
des règles d'orthotypo (capitalisation des titres, p. ex.) vient de la
nécessité d'avoir un traitement cohérent sur un vaste corpus. À quoi
servent ces règles ? à permettre au lecteur de ne pas avoir à les
connaître : comme pour l'orthographe, la régularité permet de faire
l'économie du décryptage individuel de chaque élément textuel.

Donc, un bon système orthotypographique ne souffre pas les exceptions.
Un système qui ignore les marges et accepte des replâtrages ponctuels
est un anti-système.

Imaginons un liste de noms :

BOUCHE
ELUARD
LEFEVRE
VOGÜÉ

si je vois les accents sur le dernier patronyme, j'en déduis que leur
absence est signifiante là où le typographe n'a pas jugé nécessaire de
marquer des graphies qui lui semblaient évidentes. Je suis donc certain
qu'il s'agit de MM. Bouche, Eluard et Lefevre.

En revanche, si la liste est

BOUCHE
ELUARD
LEFEVRE

je déduis que les accents ne sont pas maintenus sur les capitales dans
la marche employée, et je lis, parce qu je connais les graphies les plus
fréquentes : Bouché, Eluard (ou Éluard ?), Lefèvre.

Le 1 % Vogüé a un impact sur la liste complète. Dont je suis bien
souvent la victime !

Pour élargir le débat, vous avez une approche pragmatique et relativiste
de ces questions, très anglo-saxonne, en insistant toujours sur la
diversité (et la légitimité) des marches. La tradition française
(jacobine et républicaine) oppose à cela un goût souvent raillé des
codes.

c'est la question du communautarisme transposé en typo : qu'est-ce que
le « vaste corpus » pertinent pour une marche ? Dans une logique
communautariste, je développe ma marche pour la communauté de mes
lecteurs et les spécificités de mes publications. Donc je me simplifie
la vie en adoptant un système qui me suffit. Quand je tombe sur un cas
limite, je m'en débrouille discrètement sans trop d'état d'âme parce que
c'est marginal. Mais si la communauté de mes lecteurs n'en était pas
une ? s'il s'avérait que mes lecteurs ne lisent pas que mes
publications ? Vais-je leur demander l'effort de s'adapter à chaque
système utilisé ? Le corpus à considérer n'est-il pas l'union de toutes
les publications lues par mes lecteurs ? Ça briderait pas mal la
créativité !

En résumé, je suis toujours surpris de voir qu'une idée aussi
consensuelle que la nécessité de l'orthographe qui permet à tous de lire
le même mot d'un clin d'oeil dans *toutes* les publications se transpose
toujours aussi difficilement à l'orthotypo qui relève pourtant des mêmes
préoccupations.

--
Cordialement,
 Thierry

P.S. Le monde hispanique est un hybride intéressant entre relativisme
généralisé et centralisme : je ne crois pas qu'il existe de code au sens
français, chaque lieu éditorial d'importance a son manuel de style. Mais
il existe un académie de la langue espagnole (internationale) qui
définit l'orthographe (dans une logique beaucoup plus réformatrice que
notre Académie), et édicte des recommandations (souvent ahurissantes)
relevant de l'orthotypo. Comment qualifier l'entreprise de José Martinez
de Sousa qui, avec son _Manual de estilo de la lenga española_, a
produit un manuel de style générique destiné « aux publications
scientifiques » ? N'est-ce pas précisément une entreprise de
codification répondant à ce besoin de cohérence universelle qui
simplifie la vie des lecteurs ?