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Message : Reflexion sur la notion de grammaire typographique (Paul Terray) - Dimanche 23 Février 1997 |
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Subject: | Reflexion sur la notion de grammaire typographique |
Date: | Sun, 23 Feb 1997 14:12:52 +0100 |
From: | Paul Terray <pte@xxxxxxxxxxxxxxxxxx> |
Bonjour, Je voudrais apporter, pour ma première contribution, une petite reflexion. Elle porte sur la notion de grammaire et informatique. J'entends ici grammaire au sens large, c'est-à-dire description *a posteriori* de la langue, et des rêgles généralement observable dans celle-ci. Mon idée ici, est de dire que la typographie est une grammaire au même titre que la linguistique (à un autre niveau). La grammaire est une description à partir de la langue écrite. Elle ne l'a pas précédé, mais elle l'a bien sur influencée. Aussi, l'opération de grammatisation d'une langue est une forme de prise de pouvoir, de prise de contrôle. Elle n'est pas à la base de la langue, mais elle la modifie suivant les critères de la grammaire ainsi faite. C'est ainsi que la grammaire latine, qui a servi de base à la plupart des grammaires européennes, voire plus, a véritablement modifiée les langues dans une « logique latine » (voir à ce sujet le livre de S. Auroux, « La révolution technologique de la grammatisation »). Il en est de même pour les typographies. On sait qu'elles sont proprement historiques (je ne suis pas spécialiste, mais cela me semble un fait acquis). L'arrivée de l'imprimerie a jouée un rôle assez fondamentale dans la « grammatisation typographique », puisqu'elle a forcée à un regroupement du nombre de glyphes linguistiques (par opposition au glyphe typographique, voir l'article de J. André sur l'absence du oe (!) dans iso-latin1, dans le cahier GUTenberg numéro 25). On peut donner une multitude d'exemple (différence entre o-tréma et o-umlaut, entre béta et ß allemand). L'arrivée de l'informatique et plus précisément des codages de caractères est problématique, parce qu'elle introduit manifestement un biais : la grammaire typographique n'est plus descriptive, mais *prescriptive*. Si on peut encore introduire un glyphe inexistant dans une imprimerie au plomb, soit pour écrire un nom étranger, soit pour montrer une évolution de l'écriture, le codage informatique interdit ce genre de choses, si cela n'a pas été prévue dès l'origine. Aussi, les codages, de type ISO-latin-1 ou unicode, présente à nouveau cette prise de pouvoir qu'était la grammatisation des langues, avec des effets qui pourraient être plus rapide encore. Si certaines langues écrites ont un certain nombre de farouches défenseurs, qu'en sera-t-il des langues que peu de monde écrit, et dont les alphabets risquent de mal être codé, voire pas du tout ? Comment réagir ? Tout d'abord, il faut militer (et cette liste est, je pense, un lieu de ce militantisme) pour l'inclusion complète de nos alphabets. Mais cela n'est pas suffisant. Si nous ne voulons pas voir nos langues devenir définitivement figées, il faut permettre des moyens d'évolutions des normes. Je n'ai pas parlé de la typographie au sens de mise-en-page, mais le danger est le même : il suffit d'observer la norme HTML pour s'en rendre compte. Ceux qui pensent que la typographie est une affaire de spécialiste se trompent. C'est notre culture qui se joue, dans toute sa diversité. Une culture ne vit que dans son changement, et si les standardisations jusqu'à aujourd'hui permettaient encore d'être contournées, cela n'est plus le cas à cause du numérique. Aussi, au lieu de le rejeter, il faut en comprendre les dangers et forcer son évolutions. Voilà, j'espère ne pas avoir été trop long. Je me présente puisqu'il s'agit de ma première contribution : Je suis actuellement en thèse au service d'informatique médicale de l'assistance publique/hôpitaux de Paris (SIM AP/HP). Je travail sur les outils de lecture informatique, et plus précisément sur outil de lecture du dossier patient. Mon intérêt pour la typographie est tout à fait récent, mais je compte bien approfondir le sujet, pour les raisons ennoncées dans cet contribution. Merci d'avoir lu jusqu'ici ! -- Paul Terray - Service d'Informatique Médicale de l'AP/HP 91, bd de l'hôpital 75013 Paris - tel : 01 40 77 96 02 pte@xxxxxxxxxxxxxxxxxx
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