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Message : Orthotypographie : coup de gueule (long) (Olivier RANDIER) - Mardi 01 Juillet 1997 |
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Subject: | Orthotypographie : coup de gueule (long) |
Date: | Tue, 1 Jul 1997 04:43:41 +0200 |
From: | orandier@xxxxxxxxxxxxxxxxxxx (Olivier RANDIER) |
La polémique qui s'est engagée autour du Code typographique appelle quelques mises au point, à mon avis. Comme le suggère le titre du Code de l'IN, un Code n'est jamais qu'une collection de "règles en usage", c'est-à-dire de conventions. Une convention est une règle généralement admise tacitement par un ensemble de gens afin de faciliter la compréhension mutuelle. La typographie est une ensemble de conventions de ce genre, l'orthographe, la grammaire en sont d'autres. L'utilité d'un Code (ou d'une grammaire, ou d'un dictionnaire) est de matérialiser et, éventuellement, de rationnaliser, des règles qui n'étaient pas forcément écrites, ni bien appréhendées. Lorsqu'une convention ne correspond plus à l'usage réel, il est logique et rationnel de la changer au profit de la nouvelle règle, surtout si la nouvelle règle permet d'exprimer de nouvelles subtilités utiles. Le Code doit donc reflèter autant que possible l'état des usages du moment. Par contre, ceux qui appartiennent à la communauté "régie" par le Code en question ne feront l'économie de l'apprentissage et du respect des règles que les autres suivent qu'au détriment de la compréhension de ceux auquels ils s'adressent. Suivre ces règles est une marque de respect vis-à-vis des autres. Ce respect est, à mon avis, particulièrement crucial en ce qui nous concerne, car ce que nous composons ne s'adresse pas uniquement à des spécialistes, mais constitue l'essentiel de l'écrit que peut consulter tout un chacun. Le but principal des règles du Code est de faciliter la lecture de tous, en proposant des conventions généralement admises. Il faut les comprendre comme une facilité pour le lecteur, même si nous, qui y sommes astreints, les vivons parfois comme des contraintes. De même, il est d'usage, lorsque l'on écrit, de respecter des règles d'orthographe, de grammaire, de syntaxe, par respect pour celui qui nous lit. Certes, l'on pourrait décider, du jour au lendemain, de ne plus respecter aucune règle d'orthographe ou de grammaire, et d'écrire chacun comme on le sent. Il est certain, toutefois, que la compréhension mutuelle y perdrait beaucoup, et il est peu probable que la liberté individuelle y gagnerait. Comme le faisait remarquer quelqu'un ici, sans règles, pas de transgression possible. Sans grammaire, la réplique "Si j'aurais sû, j'aurais pas venu", dans la "Guerre des Boutons" perd tout son sel. Le Code n'est pas une Sainte Bible. Qu'il comporte des règles obsolètes, c'est probable. Mais il a le mérite d'exister, et de nous permettre quotidiennement de résoudre des problèmes pointus dans un cadre logique, et l'essentiel des règles qu'il contient est, à mon avis, juste et efficace. Mon expérience personnelle quotidienne, c'est que lorsque le Code est battu en brèche, c'est essentiellement par ignorance, voire mépris du lecteur. Lorsque l'on me propose un usage qui apparaît plus pratique ou plus élégant que ce qui est prôné par le Code, je l'adopte volontiers. C'est - très - rare. La plupart du temps, c'est, bêtement, un maquettiste qui n'a pas voulu se faire ch... à réfléchir (c'est fatiguant) au lieu de faire n'importe quoi. En fait, le principal reproche que l'on peut faire au Code de l'IN, c'est de n'être pas suffisamment explicatif et d'asséner ces règles comme les Tables de la Loi. Or, quant on connait le pourquoi de ces règles, on se rend génralement compte qu'elles sont évidentes et parfaitement justifiées. C'est vrai que, dernièrement, il y a eu pas mal de questions "d'école", c'est fatal dans une liste comme la nôtre. Certains y ont répondu par le Code, sans faire remarquer méchament qu'il n'y avait qu'à le lire. Par expérience, je peux dire que, la plupart du temps, la réponse du Code est la meilleure. Parce que ces règles ont été fixées par des siècles d'usages ET d'évolutions, et que l'on a fini par adopter les règles les plus efficaces et les moins ambiguës. Certes, je comprends que ces références continuelles au Code peuvent agacer certains, mais la liste est ouverte à tous, et elle permet ainsi aux non initiés de recevoir des réponses aux questions qu'ils se posent. Ceux que ça n'intéresse pas peuvent simplement s'abstenir de lire ces enfilades. Ceux qui suivent la liste depuis le début savent que nous ne passons pas notre temps à couper les cadratins en quatre. Il y a, certes, des sujets plus intéressants que l'emploi des accents sur les capitales, et plutôt que de perdre notre temps à répéter des règles que tout un chacun peut lire dans des ouvrages au coût fort modique ;-), nous préférons généralement parler de nouveaux usages, de nouvelles règles (pas taper) à ajouter au pot commun. C'est là le point décisif : l'enrichissement. Un usage qui enrichit la langue, le sens, j'applaudis des deux mains. Un usage qui l'appauvrit, la fait glisser un peu plus vers la "pensée unique" ambiante ne recueillera que mon mépris. Un dernier détail : le Code de l'IN (qui est le plus souvent cité ici), comme est un Code plus spécifiquement destiné au labeur. Il reflète les usages en vigueur dans le Livre. De même que nous ne suivons pas aussi strictement les règles grammaticales lorsque nous parlons que lorsque nous écrivons, de même, les règles en vigueur sont plus ou moins strictes en fonction du type de composition. Dans la publicité, où je travaille, je suis souvent amené à aménager le Code en fonction d'exigences créatives. Je le fais volontiers, lorsque j'estime que c'est justifié, mais je respecte le Code autant que possible, parce que j'estime que ce n'est pas parce que je fais de la pub que je dois fournir au lecteur de la m... D'autre part, je dirais qu'il peut y avoir des degrés dans la rigueur d'une convention. Dans le Code, on trouve, par exemple, les abbréviations, les unités de mesure. Ces règles sont à respecter absolument (d'autant que certaines font partie d'une norme ISO internationale) parce qu'une composition incorrecte peut provoquer des non-sens graves. D'autres règles sont des usages plus triviaux, comme l'usage des capitales dans les noms d'organismes, etc., et l'on pardonnera plus facilement à celui qui compose de mettre une capitale au ministre de l'Intérieur, surtout si c'est le ministre qui a insisté... ;-) Bon, j'arrête... Olivier RANDIER -- Experluette
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- Orthotypographie : coup de gueule (long), Thierry Bouche (03/07/1997)
- Re: Orthotypographie : coup de gueule (long), Paul Pichaureau (03/07/1997)
- Re: Orthotypographie : coup de gueule (long), Jacques Andre (03/07/1997)
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