Subject: |
Re: [typo] Rotativement perplexe |
Date: |
Sat, 14 Mar 2015 14:54:56 +0000 |
From: |
Jacques Melot <jacques.melot@xxxxxxxxx> |
Title: Re: [typo] Rotativement
perplexe
Le 14/03/15, à 9:51 +0100, nous recevions de
LISTES-PERSO(gmail) :
Le 12/03/2015 20:39, Jacques Melot a
écrit :
[J. M.] Cette réponse et
les deux précédentes ont un caractère très inquiétant, et
c'est peu de le dire. Je suppose qu'elles proviennent de personnes
relativement jeunes qui prennent ces féminisations comme l'état
normal de la langue, du français, n'ayant jamais connu autre chose.
Il n'en reste pas moins que ces féminisations relèvent du
harcèlement et qu'elles sont susceptibles de recevoir l'accueil qui a
été le mien.
Cher Jacques,
J'ai dépassé la soixantaine (à ma connaissance Bernard
Cerquiglini aussi).
Il me siérait donc que vous ne généralisassiez
point.
[J. M.] Dans mon esprit, il n'y avait et n'y a
toujours pas généralisation. Je parlais de faits, à savoir
d'auteurs précis de messages. Vous, qui, bien sûr, connaissez les
deux comportements langagiers, n'étiez d'ailleurs pas encore
intervenu.
Vous et moi avons des positions opposées en ce qui
concerne la féminisation de la langue. Mais, en ce qui concerne
l'anglomanie et l'« anglolagnie », nos opinions se
rejoignent, me semble-t-il du moins. En ce qui concerne le regard
porté sur l'anglais, on peut dire formuler la même critique :
pour une partie des plus jeunes génération il est évident et
normal que l'anglais est la langue universelle, que l'introduction
massive et continue de mots anglais en français, sans même se
soucier de savoir s'il existe un terme français correspondant, est
une chose non seulement naturelle, mais souhaitable, que l'anglais est
la langue de la modernité et qu'il est, là encore, normal qu'on
enseigne en anglais dans les universités françaises, qu'on parle
anglais entre Français dans les entreprises françaises, etc.
Il faut savoir que, désormais, s'opposer à ce
point de vue nous expose à des violences physiques comme j'ai pu le
constater à mes dépens il y a un an environ, avec à la clé
insultes, accusations de racisme (!), toute tentative d'explication
étant couverte par des hurlements : Espèce de Front national...
Front national (hurlé au moins quinze fois de suite), Le Pen,
raciste, sale type... Tout y est passé, alors que la personne à
qui l'auteur de ces injures s'adressait était en fait un homme de
gauche. Seul un monsieur d'un certain âge s'est interposé pour
dire, calmement, mais fermement, « Ce Monsieur à raison. J'ai
vécu quinze ans au Québec et là-bas jamais on n'aurait toléré
cela. ».
Pour dire toute l'histoire, cela s'est passé un
vendredi où le métro était exceptionnellement gratuit pour cause
d'excessive pollution de l'air. Le forcené était un employé de
la R.A.T.P. à qui j'avais reproché d'avoir obstrué la fente à
billets des tourniquets en collant dessus un morceau de papier avec,
rédigé à la main, au feutre, les deux mots FERMÉ - CLOSED. A
peine lui avais-je dit que, ce faisant, cela contribuait à
promouvroir l'anglais, qu'il s'est mis à hurler ses insanités dans
la salle de distribution des billets (de la station Tolbiac), qui plus
est après avoir appuyé sur le bouton d'appel de la Sécurité,
avant même que j'ai eu le temps de lui rappeler la politique
plurilingue tout à fait exemplaire pratiquée par sa direction
(annonces en français, anglais, allemand, espagnol, japonais et
chinois), en complète contradiction avec ses étiquettes. À un
moment, il a désigné un panneau publicitaire occupé par la
R.A.T.P. en m'y montrant, comme « preuve », le mot anglais
Welcome, trop vite et bien imprudemment, car le panneau en question
comportait en fait le mot Welcome à côté de Bienvenue, mais
aussi la traduction en six langues de ce dernier, le tout en ordre
dispersé sur l'affiche, comme on le lui a fait immédiatement
remarquer. Comme quoi il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas
voir. Bref, après avoir réussi à lui soutirer l'information
qu'il avait écrit cela par ordre de sa hiérarchie, il fit en sorte
de m'interdire l'accès aux quais. Je suis allé à pied à la
station suivante, et ai commencé mon enquête : il s'est avéré
que les employés n'avaient reçus nulle directive de la sorte et
qu'il s'agissait donc bien d'une initiative personnelle, ce qui fut
confirmé dans d'autres stations. Je me suis donc rendu au
commissariat du XIIIe arrondissement pour déposer une plainte pour
injure et diffamation (à l'époque, il était situé dans des
baraquements provisoires, devant les bâtiments qui ont entièrement
brûlé, il y a quelques années). Il y avait un tel monde et l'air
y était si vicié, que j'ai renoncé, d'autant qu'un policier à
l'accueil m'avait dit que je pouvais saisir directement le procureur
de la République dans un tel cas. Lorsque j'ai appris que les
caméras de sécurité de la R.A.T.P. n'enregistraient que les images
et non le son, j'ai fini par laisser tomber.
Ce fascisme des bien-pensants qui se croient de
gauche, dont l'intolérance s'accompagne d'un refus de communication,
prend une tournure inquiétante. Et cela ne fait que commencer. La
règle semble désormais être que tout est permis tant qu'on
respecte les tabous et que l'on se montre « politiquement
correct » (ce qui est dans le même esprit que le respect des
tabous). Vous pouvez promouvoir n'importe quelle ânerie dans ce
cadre, qu'une fois le fait accompli c'est péché que de s'élever
contre, même avec les meilleures raisons du monde. Vous protestez,
par exemple, contre les « standing ovations » qui envahissent
le petit écran, la radio, puis les médias dans leur ensemble et
immédiatement vous vous faites incendier, vous faisant traiter de
passéiste, de réac, on vous oppose l'évolution de la langue,
qu'il faut vivre avec son temps, et maintenant, parce que vous refusez
de vous laisser subjuguer par le monde anglo-saxon, que vous êtes...
raciste.
Jacques Melot
En tout amitié.
--
Luc BENTZ
http://www.langue-fr.net
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